Rétrospective 2016 : une année éprouvante pour la communauté LGBT, qui reste la plus persécutée

Ponctuée d’événements tragiques, comme en juin avec la fusillade d’Orlando, en Floride, la plus meurtrière de l’histoire des Etats-Unis, qui a fait 49 morts et plus d’une cinquantaine de blessés dans une boîte de nuit latino, fréquentée par des gays, 2016 aura été une année difficile ! Et l’incertitude pour les LGBT demeure en 2017, avec l’avènement de Donald Trump et sa fournée de réacs, comme l’éventualité en France d’une victoire à la présidentielle de la droite ou de l’extrême-droite, qui ne promet rien de guère plus réjouissant.

La polémique hypocrite autour de la toute récente campagne anti-VIH initiée par le gouvernement en direction des homosexuels, vandalisée en novembre par des intégristes et censurée par des maires LR, opposés à nos revendications, comme les soutiens de François Fillon, candidat de la droite et du centre, évoquant une incitation à la débauche et à l’homosexualité, en est un triste exemple.

Mais nous avons vécu quelques beaux moments et des avancées, avec la légalisation en avril du mariage pour tous par la Cour constitutionnelle de Colombie, quatrième pays d’Amérique du sud à l’autoriser, après l’Argentine, le Brésil et l’Uruguay. Suivi par l’Italie, avec le vote en mai d’une union civile pour les couples de même sexe, « après des années de tergiversation », même si la loi ne prévoit ni l’adoption de l’enfant de son conjoint, ni le devoir de fidélité.

En Amérique centrale, le Belize est devenu en août « la première ancienne colonie de la couronne britannique à dépénaliser l’homosexualité », une « victoire » pour les caribéens. Et Malte, le premier état en Europe à interdire les « thérapies anti-homosexualité », dites « de conversion ».

Le Portugal autorise aussi depuis mai la « Gestation Pour Autrui » (GPA), à titre gratuit, et a validé la possibilité pour toutes les femmes de recourir à la « Procréation Médicalement Assistée ».

La PMA était également une promesse de campagne du président Hollande, mais contrariée « par la violence des réactionnaires et des conservateurs », avait indiqué en juillet la ministre des familles, en référence à la mobilisation de l’opposition, ainsi qu’aux membres de la Manif pour tous, qui, outre l’abrogation de la loi mariage et adoption pour tous, sont redescendus dans la rue en octobre pour brailler contre l’ouverture des techniques procréatives en raison de l’orientation sexuelle.

En matière de reconnaissance des états civils des enfants nés par GPA, malgré les condamnations de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), là encore, le gouvernement n’a donné aucune instruction pour faciliter les transcriptions, redoutant d’être accusé de favoriser la pratique. « Les élus laissent donc les tribunaux trancher au cas par cas. »

De même, si la filiation s’établit automatiquement au sein des couples mariés hétérosexuels à la naissance de leurs enfants, les parents homosexuels ne pourront le faire qu’après une longue procédure d’adoption intraconjugale subordonnée au mariage, comme le rappelle l’Association des Familles Homoparentales.

Mais ce quinquennat n’est pas si catastrophique, même s’il conserve sa part de responsabilité en matière de discrimination, alors même que le gouvernement a dévoilé ce 21 décembre « un nouveau plan national de mobilisation » contre la haine anti-LGBT.

Les parlementaires ont adopté un amendement dans la loi de modernisation de la « Justice du XXIsiècle » visant à faciliter la procédure de changement d’état civil des « trans ». Le texte stipule que toute personne majeure ou mineure émancipée « qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe à l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue peut en obtenir la modification » devant un tribunal de grande instance. La jurisprudence le conditionnait jusque-là à « des critères psychiatriques et médicaux », exigeant « des preuves de la stérilisation ». Nous espérions un accès rapide, libre et gratuit en mairie, sans condition médicale… comme c’est déjà le cas au Danemark, en Irlande ou en Norvège, mais il faudra maintenant lutter pour la « déjudiciarisation » et veiller à ce que la loi soit appliquée. Même si encore une fois, elle ne résoudra pas tout.

La France est par ailleurs devenue au 1er janvier 2016, le premier pays européen à autoriser la prescription et le remboursement de l’antirétroviral Truvada (emtricitabine/tenofovir disoproxil), au titre d’une utilisation préventive contre le Sida, venu compléter l’arsenal déjà déployé. Pris quotidiennement ou même quelques heures avant et après une relation sexuelle, il permet de réduire très fortement le risque d’être contaminées par le VIH. Mais, si ces offres notamment destinées à améliorer la prise en charge des personnes à risque se sont multipliées au fil des ans, leur accès reste problématique dans de nombreux pays.

Nous devons donc poursuivre nos actions, combattre ce qui conduit à la stigmatisation et à la haine. Elle ne doit pas non plus « passer par des textes ou des positions que l’on conserverait par fidélité à des usages anciens », comme le soulignait dans une pétition que nous avons relayé le journal Témoignage chrétien (TC), exhortant, comme tant d’autres, le Pape à réformer le catéchisme et voter la dépénalisation universelle de l’homosexualité à l’ONU. La religion est en effet l’un des moteurs de la répression. C’est pourquoi, « au-delà de nos appartenances spirituelles, ou de nos croyances », nous devons nous réunir dans notre « commune humanité. »

Nos pensées vont plus particulièrement aux victimes, à nos proches et familles, à celles et ceux qui nous ont quitté. Nous remercions toutes les personnes qui nous soutiennent, les institutions et associations partenaires avec qui nous collaborons en totale solidarité. Et vous, par dessus tout, qui nous insufflez « la force ».

Nous avons partagé 1000 articles inédits ces 12 derniers mois, des témoignages comme autant de reportages et campagnes pour promouvoir la diversité et l’égalité. Franchi le cap du million de lecteurs. Accompagné plus de 800 personnes. Répondu à des sollicitations partout dans le monde. Procédé à plus de 3000 requêtes et signalements sur les réseaux pour incitation et propos homophobes, avec 70% de réussites. Des démarches qui ont conduit à une douzaine de procédures. Et nous persisterons, malgré les injures et menaces que nous essuyons quotidiennement.

Bonne et heureuse année.

STOP homophobie.