Montpellier «Une négligence criminelle»

En 2003, un jeune gay victime d’une tentative de meurtre avait déposé plainte. Un gendarme l’avait mise au panier. Il a comparu hier au procès des deux agresseurs, accusés d’un assassinat survenu six ans plus tard.

Un couple gay de Béziers, Eric Meynier, 30 ans, et Ludovic Serra, 42 ans, comparaissent depuis lundi devant les Assises de Montpellier. Ils sont accusés du meurtre avec préméditation d’un jeune homme de 32 ans qu’ils avaient dragué, en 2009. Volé et mis à mort, Frédéric Flourou avait été jeté dans un puits. Au cours de l’enquête sur ce crime, il était apparu que le duo avait tenté d’assassiner un autre gay, six ans plus tôt, sur un lieu de drague proche d’Avignon. Tabassé à coups de pierre, Wilfrid C. s’en était sorti par miracle, en se jetant dans le Rhône glacé. Auparavant, il s’était entendu dire: «T’es pas le premier, tu ne seras pas le dernier».

Incroyablement, la plainte de Wilfrid avait été classée. Il avait pourtant pu donner la plaque d’immatriculation de la voiture du couple. A l’époque adjoint du commandant de la gendarmerie de la commune voisine de Roquemaure (Gard), Francis Navarro était jeudi à la barre. Il n’a pas su dire pourquoi il avait escamoté l’affaire. «Je me suis enfoncé», a-t-il bredouillé. Au total, il avait enterré près de 50 autres procédures par des manipulations informatiques. Ecarté de la gendarmerie en 2010, il est aujourd’hui vigile, rappelle le «Midi Libre». «Votre négligence est criminelle», lui a lancé l’avocat général Manon Brignol. Wilfrid C. attendait beaucoup de vous. Vous avez rajouté du malheur à son malheur. Et si j’étais à la place des parents de Frédéric Flourou, j’aurais envie de hurler.»

L’avocat général a demandé 30 ans de prison pour Eric Meynier et de 25 ans pour Ludovic Serra, deux peines assorties d’un délai de sureté des deux tiers. Le verdict est attendu dans l’après-midi.