Loi anti-LGBT+ : la justice européenne dénonce une dérive liberticide en Hongrie mais peine à réagir

La Hongrie est de nouveau dans le viseur de la justice européenne. Ce jeudi 5 juin, l’avocate générale de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), Tamara Ćapeta, a rendu un avis cinglant à l’encontre de la loi hongroise de 2021 ciblant les personnes LGBT+, estimant qu’elle viole de manière grave et multiple le droit de l’Union.

Adoptée sous couvert de « protection des mineurs », la législation incriminée interdit la diffusion de contenus évoquant l’homosexualité ou les identités de genre dans les programmes éducatifs, les médias et la publicité. Un texte aux allures de censure d’État, que la magistrate considère comme discriminatoire et attentatoire aux libertés fondamentales garanties par les traités européens.

Une stigmatisation sous couvert de protection

Derrière un discours prétendument protecteur, l’avocate générale dénonce une « marginalisation systémique » des personnes LGBT+, assimilées de manière fallacieuse à des dangers pour les enfants. En les réduisant au silence dans l’espace public, la loi en question les traite comme moins légitimes, moins dignes, moins visibles. Une logique que la magistrate estime incompatible avec l’engagement de l’UE en faveur de l’égalité et des droits fondamentaux.

Au-delà des atteintes individuelles, c’est le fondement démocratique de l’Union qui est, selon elle, mis à mal. En bafouant ses obligations européennes, la Hongrie « s’écarte gravement » de l’État de droit.

Une dérive qui s’accélère

Depuis ce texte de 2021, le gouvernement hongrois n’a cessé de durcir sa ligne. En mars dernier, le Parlement a adopté une nouvelle série de dispositions répressives visant à interdire purement et simplement les marches des fiertés. Les organisateurs s’exposent désormais à des sanctions allant jusqu’à l’emprisonnement.

Deux événements ont déjà été interdits sur cette base. La prochaine cible pourrait être la Budapest Pride, prévue le 28 juin, dans le cadre de la Journée mondiale des fiertés. La police a déjà invoqué la nouvelle législation pour refuser l’autorisation de la marche.

Mobilisation des associations

Face à cette escalade, la société civile monte au créneau. Des organisations comme ILGA-Europe, appuyées par plusieurs ONG de défense des droits humains, réclament que Bruxelles passe des paroles aux actes.

Car si la Commission a bel et bien engagé une procédure d’infraction contre la Hongrie, elle n’a jusqu’ici pris aucune mesure concrète pour suspendre les effets de ces lois. Une inaction qui met en péril non seulement les droits des minorités sexuelles, mais aussi la crédibilité de l’Union dans la défense de ses propres principes.

En parallèle, une vingtaine d’États membres ont condamné publiquement les agissements de la Hongrie, appelant à une réponse forte.

« La fierté n’est pas un crime »

À l’approche de la Pride de Budapest, les appels à l’action se multiplient donc : lettres aux eurodéputés, mobilisation des chancelleries nationales, pétitions adressées à la Commission… Un mot d’ordre unit les militants : « La fierté n’est pas un crime ».

Au-delà du cas hongrois, l’enjeu est clair : il s’agit de savoir si les principes de liberté, d’égalité et de respect de la diversité sont encore des piliers concrets de l’Union européenne, ou de simples promesses sans effet.

Marcher dans la rue pour revendiquer son identité ne devrait jamais relever de la transgression. En 2025, au cœur de l’Europe, cela ne devrait pas être un acte de résistance.

Ce que nous pouvons faire

Plusieurs actions concrètes peuvent être menées pour inciter la Commission européenne à intervenir de toute urgence :

  • Contactez votre représentant européen en vous adressant au bureau de la Commission européenne dans votre pays. Vous trouverez la liste complète des bureaux à cette adresse. Vous pouvez leur demander un rendez-vous ou leur envoyer un message exprimant vos inquiétudes sur la situation en Hongrie et rappeler qu’interdire la Pride est inacceptable.
  • Interpelez votre gouvernement national, en vous appuyant sur la déclaration commune de 20 États membres de l’UE qui condamnent l’interdiction de la Pride en Hongrie et demandent une réaction ferme de la Commission. Demandez quelles mesures sont prises pour maintenir la pression sur Bruxelles.
  • Signez et partagez la pétition lancée par All Out, qui exige de la Commission européenne qu’elle mette fin à l’interdiction de la Pride hongroise.
  • Lancez votre propre initiative : en Allemagne, cette campagne rassemble actuellement signatures et soutiens d’artistes, écrivain·es et personnalités publiques pour faire pression sur la Commission européenne.