Les homophobes à la noce Sur la toile, dans les familles, l’homophobie décomplexée de 2012

“Les homophobes à la noce”: c’est le constat alarmant que dresse l’association SOS Homophobie pour l’année 2012, marquée par une augmentation sans précédent des témoignages d’homosexuels relatant insultes et agressions, surtout à l’automne avec le lancement du débat sur le mariage pour tous.

Publié mardi à quelques jours de la journée mondiale contre l’homophobie, le rapport annuel de l’association souligne le “record” du nombre de témoignages, avec 1.977 appels sur sa ligne d’écoute en 2012, soit une hausse de 27 % par rapport l’année précédente. Dans près de 50% des cas, ces témoignages évoquent des insultes, viennent ensuite la discrimination (+16 %) et les menaces (+14 %). Pour 8%, il s’agit d’agressions physiques.

Ces agressions sont en baisse par rapport à 2011 (-30), avec tout de même 122 cas, ce qui représente une agression tous les trois jours, note l’association. Elle rappelle que toutes ne sont pas aussi médiatisées que l’ont été les récentes attaques à Paris, Lille ou Bordeaux, d’autant plus qu’une partie des agressions sont commises par le voisinage ou dans la famille.

“Ahmed, 28 ans, dont la famille est très croyante, a été roué de coups par son frère. Il a porté plainte, le caractère homophobe a été retenu. Il vit à présent dans la peur, sa famille faisant pression pour qu’il retire sa plainte”, relate ainsi le rapport.

Autre drame familial rapporté par SOS Homophobie: “Emma, 15 ans, a décidé de faire son coming out à sa mère. La réaction de celle-ci a été de la menacer: ‘Je te tiendrai et il y aura dix mecs qui te passeront dessus, mais tu deviendras hétéro!” Emma vit aujourd’hui chez son père et sa tante”.

Dérapages sur la toile

Si aucun cadre n’est épargné (travail, école, lieux publics), l’explosion de propos homophobes a toutefois pour principal vecteur: internet. L’homophobie se manifeste d’abord sur les réseaux sociaux, qui concernent un tiers des cas signalés (+159% sur un an), rapporte l’association qui rappelle la circulation du mot-clé #SiMonFilsEstGay sur Twitter qui avait entraîné des milliers de dérapages en décembre.

Le débat autour du mariage pour tous a permis, “du côté des opposants, une libération de la parole homophobe, mais aussi en contrepartie, une libération de la parole des victimes qui n’ont plus hésité à témoigner et à porter plainte”, explique Elisabeth Ronzier, présidente de l’association.

Les internautes “se sentent protégés” par l’écran et “tiennent parfois des propos très violents”, explique Jean-Philippe Rathle, corédacteur du rapport, qui sert de baromètre de l’homophobie en France puisqu’aucun chiffre officiel n’existe.

L’association pointe également une forte hausse du “mal de vivre” des homosexuels, qui au fur et à mesure des débats sur le mariage pour tous se sont sentis “offensés”, “blessés” par les propos tenus lors des manifestations contre le mariage ou au Parlement. La fin de l’année a donc été particulièrement “intense”: en octobre et novembre, les témoignages ont doublé par rapport à l’an passé et en décembre ils ont triplé.

“Et le début de l’année 2013 est sur la même tendance”, constate Elisabeth Ronzier, ce que confirme l’association Le Refuge, qui tient aussi une ligne d’écoute ayant reçu depuis le début de l’année 35% d’appels en plus, à un “niveau extrêmement préoccupant”.

SOS Homophobie espère donc maintenant une décrue puisque le texte de loi sur le mariage pour tous a été voté le 23 avril, l’association redoute toutefois que “les homophobes qui ont eu presque carte blanche pour parler pendant six mois ne s’arrêtent pas du jour au lendemain”.

(Source AFP)