Le Coran ne réprime pas l’homosexualité, aucune sanction sinon un modeste « reproche », souligne Youssef Seddik

Après 10 mois d’enquête, la Commission chargée d’évaluer l’arsenal juridique tunisien en matière de libertés individuelles et d’égalité (Colibe) a publié son rapport d’activité, le 12 juin dernier. Un état des lieux, en 235 pages, avec des recommandations également, pour mettre en application les principes des droits humains tels que mentionnés dans la Constitution de 2014 et les conventions internationales.

Parmi les propositions, l’abrogation de l’article 230 du Code pénal criminalisant l’homosexualité. Ou, à défaut, une substitution de la peine de prison – jusqu’à trois ans – par la seule sanction financière, et l’abandon des examens anaux, censés prouver un comportement homosexuel. Comme l’a souligné le Comité de l’ONU contre la torture, ils « n’ont aucune justification médicale et ne peuvent être consentis de manière libre ».

Interpellé sur la question, l’anthropologue et islamologue tunisien, Youssef Seddik, s’étonne toutefois de cette suggestion de maintenir une amende contre les homosexuels, justifiée par « la sensibilité des Musulmans », explique-t-il dans une interview pour UltraSawt.

« Qu’est ce que la sensibilité des Musulmans ? Certains réclament le retour de la polygamie et de la mise en tutelle des femmes (…) Nous ne pouvons pas parler de la sensibilité de la majorité musulmane. Au contraire, quand il y a une écrasante majorité, ce sont eux qui doivent prendre en considération les droits de la minorité ».

Le philosophe a par ailleurs rappelé que le Coran ne condamne pas l’homosexualité, aucune sanction n’y est mentionnée, sinon un « reproche ». Il y a même de la gentillesse dans le Coran quand on s’adresse aux personnes homosexuelles, comme Loth a dit, « voici mes filles, femmes de la nation, elles sont plus pures pour toi. Mais, le prophète n’a pas parlé de punition divine contre les homosexuels », poursuit M. Seddik.

« Certaines choses relèvent de l’invisible, du tout-puissant (…) D’autres de nos capacités humaines. Mais il ne faut pas confondre et s’imaginer que l’homosexualité est une chose terrible qui doit être sanctionnée, surtout par un assortiment d’amendes. Il aurait été plus correct d’abolir l’infraction tout simplement, puisqu’elle n’apparaît pas dans le texte fondateur », ajoute-t-il, regrettant la timidité du Colibe, dont le rapport continue de susciter la polémique en Tunisie.

Joëlle Berthout
stophomophobie.com