Témoignage : un long parcours médical pour devenir mamans

Nous nous sommes rencontrées en 2003. Très vite, chabadabada, nous sommes tombées amoureuses. Très très vite, elle m’a demandé : « Tu voudrais des enfants, toi ? ». Et aussi vite, j’ai répondu : « Oh ouiiii ! Parce que toi aussi ?? » Elle aussi, elle en voulait. Joie, bonheur, félicité !

Bon, la suite nous a prouvé que ça n’allait pas être qu’une partie de plaisir.

Il allait falloir apprendre la lenteur. S’installer ensemble d’abord : 2 ans. Savoir si tout allait bien, si mon nouveau job allait me convenir : 1 an. Et puis, le 21 juin 2006, au resto chinois, alors que nous avions signé un pacs quelques semaines auparavant, j’ai lancé : « Alors, on le fait, ce bébé ? ».

Pour des tas de raisons (mon âge un peu plus avancé que le sien, son non-désir de grossesse, et d’autres choses plus personnelles), nous avions convenu que je porterais notre premier enfant.

S’en suivirent moult réflexions :

  • Comment on va faire ? On trouve un monsieur qui nous donne de la matière première ?
  • Mais qui ? Ah oui, qui ???
  • Ou alors on invoque la médecine, qui fait tant de miracles ?
  • Ah oui mais où ? Espagne, Belgique, Pays-Bas, Danemark ?
  • On a des sous ?

Nous avons finalement décidé de faire des inséminations artificielles avec donneur anonyme, en Belgique, à Bruxelles. Nous avons trouvé une gynécologue, à deux pas de chez nous, qui acceptait de suivre un couple de femmes. Jusque-là, tout allait plutôt bien.

Nous avons pris rendez-vous dans une clinique belge. Deux mois plus tard, nous étions reçues par un médecin charmant, avec un bel accent belge, qui nous a expliqué le protocole. J’ai subi une très légère stimulation : j’avais 33 ans, aucun problème de santé particulier, pour lui, ça allait fonctionner rapidement.

Le premier essai a eu lieu en janvier 2007. Il fut négatif, mais malheureusement, nous savions que nous avions environ 1 chance sur 5 que ça fonctionne. J’ai enchaîné 3 autres essais jusqu’en juillet, tous négatifs. J’étais épuisée. C’était difficile de faire ces inséminations artificielles à l’étranger, de partir au dernier moment, de s’arranger avec nos jobs, de poser des jours de congés du jour au lendemain, de joindre la clinique, de se lever le matin pour faire des prises de sang et des échographies avant de partir travailler…

Un ami nous a alors proposé de nous faire le don qui nous manquait. Nous avons beaucoup discuté pour savoir la place que chacun aurait auprès de l’enfant, et nous nous sommes lancés. Cet ami habitait à 450 kilomètres de chez nous, les voyages restaient compliqués. Nous avons fait 8 essais ensemble, entre septembre 2007 et juillet 2008. Aucun n’a été positif. Nous avons stoppé notre « collaboration » d’un commun accord, et j’ai décidé de reprendre les IAD.

J’ai changé de gynécologue français, et ce nouveau médecin m’a prescrit une stimulation un peu plus forte. Il fallait que ma compagne m’injecte dans le ventre un produit stimulant l’ovulation. Chaque soir, je me pinçais la peau du ventre et elle me faisait la piqûre. J’ai ainsi fait deux IAD supplémentaires, en septembre et en décembre 2008. Négatives.

Au bout de 6 IAD négatives, la clinique belge proposait de passer à la fécondation in vitro (FIV). Autre protocole, plus lourd, autre budget aussi ! Mais j’étais très décidée, et en avril 2009, j’ai entamé le protocole pour faire une FIV. Les piqûres étaient plus longues, plus nombreuses, mais j’ai supporté le traitement vaille que vaille. On m’a prélevé 11 ovocytes, dont 4 ont donné des embryons. Trois jours après la ponction, je suis retournée à Bruxelles où 2 embryons m’ont été transférés dans l’utérus. Quinze jours plus tard, le verdict fut sans appel : négatif…

En juin, je suis repartie pour qu’on me réimplante les deux embryons qui avaient pu être congelés. La loi des séries a continué… Négatif…

Nous sommes opiniâtres, ma chérie et moi, et en septembre, je suis retournée faire une deuxième FIV en septembre 2009. La ponction fut compliquée car j’ai subi une hyperstimulation, c’est-à-dire que je suis tombée très malade. Mais j’ai eu 20 ovocytes prélevés, qui ont donné cette fois 11 embryons… Trois jours plus tard, on m’en transférait deux. Et quinze jours après… Verdict : négatif. Je n’étais toujours pas enceinte…

Nous avons alors beaucoup réfléchi, ma chérie et moi. Que faire ? J’avais perdu confiance en moi. Je pensais que je ne serais jamais maman, que la nature me refusait ce droit… C’est là que ma chérie m’a dit qu’elle se sentait prête à porter notre enfant, et que si je le voulais bien, elle pourrait porter mes embryons… Serait-ce possible ?

En janvier 2010, nous nous sommes rendues à la clinique de Bruxelles pour demander s’il était possible de transférer mes embryons dans le ventre de ma conjointe. La réponse fut oui. Nous avons alors tenté l’impossible…

En avril 2010, nous nous rendions une fois encore dans cette clinique, où deux de mes embryons furent implantés dans l’utérus de ma chérie. Quinze jours après, le verdict fut sans appel : elle était enceinte ! Le test de grossesse était bel et bien positif, ce qui fut confirmé le soir-même par une prise de sang.

La grossesse ne fut que joie et bonheur, transportées que nous étions par la venue de cet enfant…

En janvier 2011 naissait notre fils, Théophile.

Pour la loi, il n’a qu’une seule maman, ma compagne. Il nous appelle Maman Mayé et Maman Nanoue. Nous sommes là toutes les deux au quotidien pour lui. Mais moi, je ne suis rien aux yeux de la loi.

C’est pour ça que nous nous marierons en novembre prochain. Pour que nous puissions lancer un dossier d’adoption, pour que je puisse adopter mon fils, et qu’il devienne mon fils légalement. Pour que s’il arrivait quelque chose à ma compagne, personne ne puisse nous séparer, mon enfant et moi. Pour que je puisse lui léguer des biens, ainsi que mes parents… Pour qu’il porte mon nom, tout simplement.

Nous entendrons bientôt notre famille et nos amis s’écrier « Vive les mariées ! » à la mairie, et pour nous, ce sera le premier pas vers l’officialisation de notre famille, pour que notre petit garçon ait deux parents pour la société entière.

Par Anne

Chroniqueuse.
Nous sommes deux mamans de 36 et 40 ans, et nous avons un petit garçon de 2 ans et demi, Théophile. Nous habitons en région parisienne. Nous nous marierons en novembre prochain, puisque la loi le permet désormais.