Témoignage : « Si on avait reconnu ma transidentité quand j’avais 5 ans, quelle aurait été ma vie ? »

Hélène Hardy est la première femme transgenre à accéder à la direction nationale d’un parti politique français. Elle est devenue conseillère fédérale d’Europe écologie Les Verts (EELV). Elle raconte à La Voix du Nord sa vie de femme transgenre, le rôle d’homme qu’elle a joué pendant 55 ans, le grave retard médical, administratif et législatif de la France dans ce domaine. Elle veut aujourd’hui se battre pour la reconnaissance des enfants transgenre.

« Si on avait reconnu ma transidentité quand j’avais 5 ans, quelle aurait été ma vie ? »

« Mon premier souvenir, j’avais 4 ou 5 ans. Je voulais être comme ma sœur. » Hélène a ce point commun avec toutes ses copines femmes transgenre d’avoir des souvenirs remontant à la petite enfance à propos de son décalage entre genre et corps. « Si on avait reconnu ma transidentité quand j’avais 5 ans, quelle aurait été ma vie ? »

Hélène veut conduire ce combat pour la reconnaissance des enfants transgenres. Ses nouvelles fonctions de conseillère fédérale d’Europe écologie Les Verts (EELV) l’y aideront.

Parce qu’il lui a fallu attendre trop longtemps pour mettre en adéquation corps et âme : « Le jour de mes 55 ans, j’ai compris que je ne deviendrai pas une femme si je ne faisais rien. Je ne voulais pas mourir en homme ! » Son couple n’y a pas résisté. Et son fils a eu tant de mal à accepter ce changement, que celui qui était alors Xavier a préféré renoncer à la prise d’hormones au bout d’une année.

Mais 8 ans plus tard, remettre n’était plus possible. « J’ai fait mon coming out auprès de ma famille, de mes collègues. » Et Hélène a succédé à Xavier à la direction de la Mission locale et de la Maison de l’emploi de Villeneuve-d’Ascq. Plus facile qu’elle ne le pensait : « Depuis que j’ai basculé, je me rends compte que j’étais tout le temps en représentation. Je me débrouillais pas mal », sourit-elle.

La lumière de ses yeux bleus ne s’est vraiment allumée que depuis 12 mois. « Je n’ai plus besoin de jouer au mec. C’est reposant. » Même si le chemin est encore long. La transformation physique d’Hélène aura lieu à Gand (B), avec l’équipe du professeur Stan Monstrey : « C’est une des meilleures équipes mais il y a 18 mois d’attente. » Moins qu’à Lyon, un des deux centres hospitaliers français, avec Bordeaux, reconnus pour la qualité de ses opérations. Là, il faut trois ans de patience.

À Lille, une nouvelle équipe semble émerger avec le CHR. Un soulagement : Hélène garde un exécrable souvenir de son passage entre ces murs il y a 8 ans. « Les institutions sont en retard en France. » Pas seulement la médecine. Changer d’état-civil est un autre parcours du combattant, long, incertain et coûteux : « Lors du débat sur la Loi de simplification de la justice, il y a eu un timide amendement socialiste pour permettre le changement d’identité devant le procureur et plus devant le juge. » Ce qui aurait permis au demandeur d’économiser les frais d’avocat, près de 2 000 €. Le gouvernement a fait rejeter l’amendement. « Le texte doit revenir en deuxième lecture. C’est le moment d’agir. »