Sénégal : la dépouille d’un « homosexuel » exhumée et brûlée en place publique

Le corps d’un jeune homme d’une trentaine d’année, « C. Fall », enterré la veille « en toute discrétion » par sa famille au cimetière de Léona Niassène, à Kaolack, à quelque 200 kilomètres de Dakar, a été exhumé de son caveau puis brûlé, ce samedi 28 octobre, par une foule de jeunes fanatisés et « en liesse », qui s’était déjà opposée à son inhumation pour « présomption d’homosexualité ». Ils étaient même allés jusqu’à « assiéger » la maison mortuaire, provoquant une émeute et des affrontements avec la police.

Initialement, la famille du défunt espérait enterrer le corps à Touba, fief de la confrérie musulmane des mourides, considérée comme ville sainte, à quelque 200 km de Dakar, conformément aux volontés de sa mère. Mais les administrateurs de la mosquée et des cimetières (Dahira Moukhadimatoul Khidma) ont refusé parce que, selon les rumeurs, « le décédé était homosexuel ».

Tout a été filmé, diffusé sur les réseaux et relayé par la presse locale. Les images sont insoutenables. STOP homophobie a été alertée par ses militants sur place, qui connaissaient C. Fall, et par de nombreux témoignages sidérés, tristes et indignés.

Le journaliste et écrivain sénégalais, Mamoudou Ibra Kane, candidat à l’Élection présidentielle 2024, a d’ailleurs réagi sur X ( ex-Twitter), se déclarant préoccupé par cette violence et manque d’humanité.

Dans un communiqué, le procureur de la République, Abasse Yaya Wane, a annoncé dimanche l’ouverture d’une enquête, afin d’identifier les auteurs de ces actes « d’une extrême gravité et relevant de la barbarie », et donc engager des poursuites pénales.

Réponse salutaire, insiste Alexis Thiam, président d’une association consœur qui gère au Sénégal un refuge soutenu par STOP homophobie. « C. Fall était un ami, je suis profondément choqué, mais soulagé que le parquet poursuive », ajoute-t-il.

Car « si l’homosexualité est un délit passible d’un à cinq ans de prison au Sénégal, selon les articles 319 du Code pénal sénégalais, la violation de tombeau ou de sépulture, ainsi que la profanation ou mutilation d’un cadavre est aussi puni d’un emprisonnement de trois mois à un an, et de 50.000 à 180.000 francs d’amende, sans préjudice des peines contre les crimes ou les délits qui seraient joints à celui-ci. Désolé de tout citer mais oui, nous sommes normalement un état de droits. Il était donc nécessaire que la justice réagisse. Ces actes ne peuvent pas restés impunis. Tout ceci c’est de la folie, pas le Sénégal », conclut Alexis, en dénonçant les lois homophobes instaurées et qui produisent ces horreurs. « Où est passée leur humanité ? en effet. A C. Fall et à sa famille. ».