PIRE QUE LES GAYS: LES «GAYMEN» INQUIÈTENT LE BÉNIN ::

On les appelle «gaymen», mais ils ne sont pas homos: ce sont les jeunes arnaqueurs qui sévissent sur internet depuis les cybercafés africains. Un sobriquet qui semble ne rien devoir au hasard.

 

«Le déclin moral et social prend de l’ampleur au quotidien», se désole «La Nouvelle Tribune». Le site béninois consacre aujourd’hui un article (manifestement inspiré d’un reportage de 2009) sur l’attrait de la cybercriminalité auprès des jeunes de ce pays francophone d’Afrique de l’Ouest. On y apprend que dans les faubourgs de Cotonou, les adeptes de la «fraude 4-1-9» ou de l’«arnaque à la nigériane» ont un surnom surprenant: les «gaymen». Un sobriquet que le site n’explique pas. Mais dans ce pays où les rapports entre personnes de même sexe sont légaux mais encore tabous, l’analogie ne semble pas due au hasard. Le fait que des ados dès 12 ans et des jeunes adultes n’hésitent pas – entre autres stratagèmes – à se faire passer pour des gays sur des forums et sites de rencontres a sans doute frappé les esprits. De fait, l’utilisation par des escrocs africains des plateformes de drague homo à des fins d’extorsion est attestée depuis le milieu des années 2000.

 

Leurs procédés, en constante évolution, sont vieux comme internet: faire connaissance sous un pseudo bidon, se prétendre en détresse (les Nigérians exploitent la persécution des minorités sexuelles dans leur pays pour convaincre leur correspondant) ou faire miroiter une bonne affaire, afin que le «pigeon» consente à verser une confortable avance en cash via un service international de transferts de fonds.

 

Péril moral

Sous certains aspects, l’image de ces arnaqueurs dans la société béninoise et celle des homosexuels se croisent: ce sont deux facettes d’un véritable péril moral. Chez les «gaymen», c’est par exemple le goût pour le luxe ostentatoire, avec des motos rutilantes et des fringues de marque. «La Nouvelle Tribune» s’alarme en particulier du fait que ces jeunes ne marchandent pas, et contribuent ainsi à l’augmentation des prix sur les marchés. Et puis être «gayman», ce serait contagieux. La perspective de l’argent facile pousserait de plus en plus d’ados à délaisser leur famille pour intégrer une «mafia» et à sécher les cours pour passer des heures dans les cybercafés. Au passage, ils monopoliseraient les écrans au détriment d’autres utilisateurs, notamment des étudiants.

 

Des individus sans foi ni loi, les «gaymen»? Evidemment, les principaux intéressés s’en défendent. Dans un article reproduit par le blog Vertesentinelle.bj, Ike, un Nigérian vivant au Bénin, se dit investi d’une mission historique: Les Occidentaux, justifie-t-il, «ont pillé notre continent et l’ont vidé de ses ressources, c’est à notre tour».