LGBTQ+, migrants, anti-Trump : les tensions sous le pontificat de Léon XIV

L’élection de Robert Francis Prevost comme 267ᵉ pape, désormais Léon XIV, provoque un mélange d’espoir et de prudence au sein des communautés LGBTQ+ catholiques et de leurs alliés. Alors que son prédécesseur, François, décédé le mois dernier à l’âge de 88 ans, avait ouvert quelques timides brèches dans la doctrine en insistant sur la « miséricorde » et l’accueil, le parcours et les rares déclarations publiques du nouveau pontife laissent planer des interrogations sur les orientations futures du Vatican en matière d’inclusion.

Un parcours international, un positionnement flou

Né en 1955 à Chicago, ordonné prêtre chez les Augustins, Robert Prevost a passé près de vingt ans au Pérou, où il fut missionnaire, enseignant, puis évêque. Ce long engagement sur le terrain, marqué par la proximité avec les plus vulnérables, lui a valu d’être naturalisé péruvien et décrit comme un homme d’Église « sans frontières », attentif aux questions sociales et humanitaires. Ces dernières années, il occupait un poste stratégique à Rome : préfet du dicastère pour les évêques, un rouage clé dans la gouvernance de l’Église mondiale.

Pourtant, une déclaration faite en 2012, alors qu’il était encore évêque à Chiclayo, a refait surface depuis son élection. Dans un discours adressé à ses confrères, il dénonçait « la sympathie croissante des médias pour des croyances et pratiques contraires à l’Évangile », citant notamment « le style de vie homosexuel » et les « familles alternatives composées de partenaires de même sexe et d’enfants adoptés ». Ces propos, jamais explicitement reniés, contrastent avec la ligne plus accueillante adoptée par François.

Silence sur les enjeux LGBTQ+

Depuis, Léon XIV ne s’est pas exprimé publiquement sur les réalités LGBTQ+, laissant place à toutes les spéculations. Son profil, jugé modéré voire discret, tranche avec le ton pastoral et parfois disruptif de son prédécesseur, qui n’avait pas hésité à rencontrer des catholiques homosexuels ou transgenres, à affirmer que « Dieu aime chacun tel qu’il est », tout en refusant néanmoins les bénédictions des couples de même sexe.

« Il est encore trop tôt pour savoir s’il poursuivra la dynamique d’écoute engagée par François ou s’il marquera une inflexion plus doctrinale », observe une source proche du Vatican. « Jusqu’à présent, il ne s’est jamais engagé clairement sur ces sujets. »

Une Église à la croisée

L’arrivée de Léon XIV intervient dans un contexte de fracture interne au sein de l’Église, partagée entre tenants d’une lecture plus rigide du catéchisme et partisans d’une adaptation aux réalités contemporaines. Si de nombreuses associations espèrent que le nouveau pape poursuivra les efforts d’ouverture, d’autres redoutent un retour à une posture plus fermée, à l’image des propos de 2012.

« Les mots ont une portée, et l’absence de clarification entretient le doute », souligne un militant parisien engagé pour une Église inclusive. « Nous attendons des gestes, des paroles fortes, qui confirment que l’élan donné par François n’était pas un simple intermède. »

Un pape critique de Donald Trump

Autre signal notable : avant son élection, alors qu’il était encore cardinal, Robert Prevost faisait entendre sa voix contre certaines politiques de Donald Trump, en particulier sur l’immigration. Sur son compte X (anciennement Twitter), il relayait régulièrement des critiques de l’administration républicaine, selon les archives relevées par le New York Post.

Si ces prises de position peuvent rassurer sur une certaine continuité avec la dimension sociale du pontificat précédent, elles ont aussi contribué à dresser de lui le portrait d’un prélat en retrait de l’ultraconservatisme politique.

Malgré tout, Donald Trump a salué son élection sur sa plateforme Truth Social, parlant d’« un grand honneur pour les États-Unis » et exprimant son désir de le rencontrer prochainement.

Continuité ou rupture ?

Le nouveau pontificat pourrait s’inscrire dans la continuité prudente du précédent ou, au contraire, marquer un recentrage plus doctrinal. La question de l’inclusion des personnes LGBTQ+ – longtemps marginalisée – est aujourd’hui l’un des marqueurs de cette évolution. À Léon XIV revient désormais la responsabilité de trancher l’orientation pastorale de son pontificat.

Une décision suivie de près par des millions de fidèles LGBTQ+ dans le monde, pour qui l’Église reste un lieu de foi, mais aussi de blessures, d’attentes et d’espérance.