Béziers : Raymond Couderc refuse toujours le mariage gay

Malgré la loi, le maire en appelle encore à l’objection de conscience. Que risque-t-il ? N’y aura-t-il pas d’union à Béziers ?

La loi a été votée et même maintenant promulguée. Le 29 mai, le premier mariage homosexuel sera célébré à quelques kilomètres de là, en mairie de Montpellier.

Pour le sénateur-maire de Béziers, Raymond Couderc, cela ne change rien.

Farouche opposant à cette loi, il a été l’un des premiers à monter au créneau. Et il persiste et signe, en appelant depuis quelques semaines au droit à “l’objection de conscience”.

Depuis quelques jours, l’édile biterrois est à nouveau l’un des maires UMP les plus interrogés sur le sujet dans les médias nationaux, avec son homologue de Vienne, Jacques Remiller.

Ce dernier vient d’ailleurs d’écrire à François Hollande pour lui rappeler ses propos “sur la liberté de conscience des élus”. Indiquant encore qu’il refusera de célébrer les mariages de personnes de même sexe et que personne, dans sa majorité, ne souhaite le faire.

Il envisage donc de prendre un arrêté municipal afin que les membres de l’opposition puissent s’en charger.

Raymond Couderc n’en est pas là. Même s’il insiste sur sa volonté de s’abstenir.

“Ma conscience m’interdit de faire ce genre de choses, donc je ne le ferai pas. J’estime qu’on doit pouvoir avoir le droit de ne pas faire quelque chose qui est en contradiction totale avec ses propres convictions”, dit-il.

Il ne revêtira donc pas l’écharpe tricolore face à un couple gay.

S’expose-t-il pour autant à des poursuites ? Selon la loi, les maires agissent en tant qu’agents de l’État et sont obligés de se conformer aux lois en vigueur.

Le maire peut aussi déléguer les mariages à des membres de l’opposition

S’ils refusent d’organiser un mariage, ils risquent des sanctions et même une révocation de leurs fonctions d’officier d’état civil. Voire, selon l’article 225 du code pénal, jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende.

Au niveau administratif, les couples homosexuels pourront aussi saisir le préfet, afin que celui-ci mette en demeure le maire pour qu’il procède au mariage, au nom de la loi.

Mais tout cela n’est que théorie.

Le code général des collectivités territoriales prévoit aussi la possibilité pour un maire de “déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l’absence ou en cas d’empêchement des adjoints, à des membres du conseil municipal”.

Donc des membres de l’opposition.

Raymond Couderc est le premier à en convenir : “Je célèbre très peu de mariages, je délègue la plupart du temps, je ne vais pas modifier mon mode de fonctionnement”, glisse-t-il.

Et au sein de sa majorité, même s’ils ne le disent pas très fort, certains élus accepteront de célébrer toutes les unions.

Béziers n’échappera pas au mariage pour tous.

Réaction nationale : Pour David Assouline, “c’est intolérable”

Lors de son point presse hebdomadaire, David Assouline, porte-parole du Parti socialiste, a dénoncé avec force les propos de certains élus, Raymond Couderc en première ligne donc, opposés au mariage pour tous et qui refuseront de célébrer ces unions.

Pour David Assouline, ces élus “revendiquent le fait d’enfreindre la loi pour des raisons discriminatoires clairement affichées. Où s’arrête-t-on si une telle chose est tolérée ?

Tel couple, parce qu’il n’a pas la bonne couleur ou les bonnes origines, pourrait ne pas être marié. Aujourd’hui, la loi c’est que les couples homosexuels doivent être mariés. Que certains veulent s’en soustraire est tout à fait inadmissible. Et il faut que des voix s’élèvent partout y compris dans la droite républicaine, qu’on n’entend pas assez, pour dire que c’est intolérable.

Bien entendu, nous savons que des maires peuvent déléguer, ça a lieu tous les jours. Dans toute la France. Aujourd’hui personne ne se risquerait à dire “je délègue pour ce couple qui a telle origine”. Ce que je peux affirmer, c’est qu’il y a une loi qui s’applique aux officiers d’état civil et que l’État garantira sur l’ensemble du territoire la célébration de ces mariages.”

Réaction locale : Pour Guilhem Johannin, le maire doit “quitter sa fonction”

L’écologiste Guilhem Johannin, candidat à l’hôtel de ville n’a pas tardé à réagir aux propos du sénateur-maire de Béziers :

“L’appel de Raymond Couderc lancé aux maires d’invoquer leur objection de conscience pour refuser de célébrer les mariages homosexuels n’est qu’un mensonge au service de la lâcheté. (…)

Cette comparaison est grossière : les élu/es sont des engagé/es volontaires au service de l’État et des citoyens, pas des appelé/es contraints. Imaginerait-on un prof faisant fi du programme, un médecin parjurant son serment, une policière ignorant les procédures ou un juge méprisant la loi… objectant leur conscience ?

C’est en conscience que les élu/es s’engagent. Ils/elles ont toujours la liberté de mettre fin à cet engagement et je demande donc à Raymond Couderc, s’il estime être heurté dans ses convictions, de quitter sa fonction de maire à l’instant, la loi instituant le mariage pour tous étant promulguée.
Enfin, mettre sur le même plan philosophique, le refus de porter une arme et le refus d’unir des gens qui s’aiment relève à mon sens de la déjection de conscience “.

LUDOVIC TRABUCHET

midilibre.fr