Aucune loi anti-discrimination ni de marche des fiertés, mais la Chine reste l’une des nations d’Asie les moins hostiles aux LGBT

Depuis déjà plusieurs année, les médias sociaux chinois font échos aux revendications des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT), décriées par les autorités. Mais le 13 avril dernier, Weibo, l’équivalent en Chine de Twitter, a annoncé une campagne pour « assurer un environnement et une société clairs et harmonieux », avec la suppression des messages et contenus faisant notamment référence à l’homosexualité. Face au mécontentement de ses utilisateurs, ralliés à travers plusieurs hashtags, dont #JeSuisHomosexuel, la plate-forme a finalement levé son interdiction cette semaine, remerciant « tout le monde pour leur discussion et leurs suggestions ».

« C’est une victoire et un signe plutôt positif », estime dans un entretien à l’AFP, Xiao Tie, directrice du centre LGBT de Pékin, « mais le réseau social ne s’est pas excusé, donc le problème n’est pas complètement résolu. Et nous faisons toujours face à de nombreuses difficultés. »

En dépit du tollé suscité, les régulateurs n’ont pas encore commenté la décision de Sina Weibo.

Rappelons que l’homosexualité a été dépénalisée en Chine en 1997 et supprimée de la liste des désordres psychologiques en 2001. Elle continue pourtant d’être perçu comme une « déviance », surtout dans les campagnes, où règne une vision conservatrice de la société.

« Aucune série télévisée ne doit montrer de relations sexuelles et de comportements anormaux, comme l’inceste, des relations entre personnes de même sexe, des perversions sexuelles, du harcèlement sexuel, des agressions ou des violences sexuelles », indiquait en 2016 une circulaire officielle transmise aux chaînes de télévision.

L’an passé, les vidéos montrant des relations homosexuelles ont été bannies des plateformes de diffusion en streaming sur internet. Le film « Call Me By Your Name », qui raconte une histoire d’amour entre deux hommes en Italie, Oscar 2018 du meilleur scénario adapté, a été déprogrammé de l’actuel Festival international du film de Pékin. Il figurait pourtant dans la pré-liste des œuvres à diffuser.

Pour la première fois, un film ouvertement gay est actuellement à l’affiche dans les salles en Chine. « Looking for Rohmer », une co-production franco-chinoise sur une relation amoureuse entre un Chinois et un Français (joué par Jérémie Elkaïm). Mais de nombreuses scènes ont été coupées au montage, rendant peu perceptible la romance entre les deux personnages, qui ne s’embrassent jamais dans la version finale.

Des valeurs familiales solidement ancrées imposent ainsi de se marier tôt et d’avoir des enfants. Deux choses quasi-impossibles, le mariage entre personnes de même sexe n’étant pas légal en Chine.

Il n’y a pas non plus de loi anti-discrimination et aucune « marche des fiertés » n’est organisée dans le pays, où toute manifestation reste perçue comme une menace potentielle pour la stabilité sociale.

Malgré cela, la Chine reste l’une des nations d’Asie les moins fermées à l’égard de l’homosexualité. La plupart des jeunes urbains n’ont pas d’animosité envers les personnes LGBT, des bars gays ouvrent, et de nombreux événements sont organisés. Ce 15 avril, plus de 20.000 personnes ont participé à un « Marathon Arc-en-ciel », pour sensibiliser la population.

De récentes décisions de justice vont également dans le sens d’une plus grande ouverture. En 2017, une personne transgenre a gagné un procès pour licenciement illégal dans la province du Guizhou (sud-ouest). Et l’été dernier, un hôpital psychiatrique du Henan (centre) a été condamné pour avoir imposé à un patient gay un « traitement » censé le guérir contre son gré de son orientation sexuelle, via des pilules et des injections.