Une nouvelle plainte vient raviver les tensions autour du prestigieux lycée privé Stanislas, à Paris. Une ancienne élève, exclue en 2022 après avoir dénoncé des propos homophobes, sexistes et racistes au sein de l’établissement, accuse désormais les auteurs d’un rapport d’inspection de l’Éducation nationale d’avoir falsifié un document public. Elle dénonce un rapport « modifié » dans ses conclusions, ayant selon elle affaibli la portée des nombreux témoignages recueillis.
Pauline (prénom modifié), scolarisée à Stanislas de 2013 à 2022, avait déposé une première plainte en juillet 2023 contre plusieurs anciens responsables de l’établissement, dont le directeur de l’époque. Elle affirmait avoir été sanctionnée pour avoir pris la parole contre un climat discriminatoire persistant, que l’administration aurait ignoré, voire couvert. L’affaire avait suscité une vague d’indignation, alimentée par des révélations sur des propos hostiles aux personnes LGBT+, tenus notamment par un ancien intervenant bénévole.
Un an plus tard, la jeune femme engage une nouvelle procédure, cette fois pour faux en écriture publique par une personne chargée d’une mission de service public — une infraction passible de 15 ans de réclusion criminelle. Dans sa plainte, déposée vendredi 3 mai, elle conteste la sincérité d’un rapport de l’Inspection générale de l’Éducation, daté de juillet 2023, rapporte l’AFP.
Ce rapport, rendu public début 2024 par Mediapart, concluait que « les faits d’homophobie, de sexisme et d’autoritarisme » signalés par la presse à l’été 2022 n’étaient pas confirmés. Or, selon plusieurs sources et documents transmis à la commission d’enquête parlementaire sur les violences dans les établissements scolaires, cette conclusion serait en contradiction avec le contenu initial de l’enquête. Deux inspectrices désormais retraitées affirment que le rapport a été « édulcoré » par rapport à ce qui avait été constaté sur le terrain, notamment concernant les témoignages relatifs à des comportements discriminatoires.
L’une de ces inspectrices a écrit à la présidente de la commission d’enquête, la députée PS Fatiha Keloua Hachi, déclenchant la convocation prochaine des quatre auteurs du rapport pour audition. La deuxième inspectrice a transmis un courrier similaire. Ces alertes alimentent les soupçons de traitement de faveur en faveur de Stanislas, établissement sous contrat avec l’État, réputé proche de cercles conservateurs.
Dans sa plainte, Pauline dénonce des conclusions qui ont « remis en cause sa parole » et « entravé la manifestation de la vérité ». Son avocat, Me Vincent Brengarth, évoque « un camouflage » qui nuit à la crédibilité de l’enquête administrative sur des faits graves.
L’Inspection générale de l’Éducation nationale, de son côté, affirme que le rapport n’a pas été modifié après sa validation collective. « Le document transmis au ministère correspond à la version validée par l’ensemble des inspecteurs missionnés », indique l’institution.
STOP homophobie et Mousse avaient déjà saisi la justice en janvier 2024 pour discrimination LGBT+phobe dans le cadre de l’affaire Pauline. Une enquête est également en cours sur des propos homophobes et sexistes attribués à un ancien intervenant bénévole, à la suite d’un signalement de l’Inspection elle-même.
Le cas de Stanislas s’inscrit dans un climat de forte vigilance sur les discriminations au sein des établissements scolaires, alors que plusieurs voix, dans la société civile comme au Parlement, appellent à davantage de transparence sur le traitement des violences systémiques, y compris dans les structures privées sous contrat.