Il témoigne sur sa thérapie de « conversion », espérant qu’aucun autre homosexuel n’ait à subir cette « torture »

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Le gouvernement britannique a dévoilé cette semaine un plan pour « améliorer la vie » des personnes LGBT (lesbiennes, gays, bi, trans), doté d’un budget de 4,5 millions d’euros.

D’après une étude menée en 2017 par le Bureau gouvernemental des égalités auprès de 108.000 personnes se définissant comme homo, bi ou transsexuelles, 70% des répondants ont confié manquer de franchise, quant à leur orientation sexuelle. 68% déclarent éviter de tenir la main de leur partenaire en public par peur d’une réaction négative.

Plus de 5% se sont également vus proposer une thérapie de « conversion », que 2% (2,160 personnes) ont suivi. Des pratiques qualifiées d’« abjectes » par Londres, qui promet de les « éradiquer ».

Peter Price avait 18 ans quand il en a subi une, pour prétendument le guérir de son homosexualité. Si les trois jours de traitements intensifs n’ont rien modifié à son orientation sexuelle, il en a gardé des séquelles.

Animateur de radio, installé à Liverpool (nord de l’Angleterre) et âgé aujourd’hui de 72 ans, il s’indigne encore qu’aucun texte n’interdise cette pratique au Royaume-Uni.

Après avoir longtemps refusé d’évoquer cet épisode traumatique, il accepte désormais de revenir sur son expérience, espérant qu’aucun autre homosexuel n’ait à subir cette « torture ».

A l’époque, le jeune homme avait accepté de se rendre au Diva Hospital, un établissement psychiatrique situé à Chester, pour mettre fin aux angoisses de sa mère. « Elle était désespérée quand je lui ai annoncé que j’étais homosexuel », confie-t-il à l’AFP. C’était en 1964, et l’homosexualité était encore un délit.

« Nous sommes allés voir un médecin, qui nous a dit qu’il existait un remède ». Celui-ci consistait à suivre un traitement pendant cinq jours, une « thérapie par aversion », qui expose le patient à une stimulation sexuelle associée à une expérience désagréable.

Dans une pièce sans fenêtre, il se voit imposer le même rituel d’heure en heure : écouter le récit d’actes sexuels sur une cassette audio, regarder des photos d’hommes en maillot de bain, tout en subissant régulièrement des injections provoquant diarrhées et vomissements.

« J’étais allongé dans mes excréments, c’était éprouvant », se souvient-il. « L’idée, c’est de provoquer un sentiment de répulsion quand vous pensez à un autre homme ».

Après trois jours sans interruption, il cherche à quitter l’hôpital. « Je devenais fou, je n’étais plus du tout intéressé par le traitement, je voulais juste sortir de là ». Malgré l’insistance du psychiatre supervisant les opérations, il parvient à échapper à l’étape finale de la thérapie, la pose d’électrodes censées délivrer un choc électrique à chaque manifestation d’excitation.

« Après cela, j’ai décidé de changer de vie, et d’assumer qui j’étais », confie-t-il.

Il ne réussira jamais néanmoins à faire le récit de son expérience à sa mère. Il faudra le cas médiatisé de plusieurs soldats expulsés de l’armée britannique à cause de leur homosexualité, et rétablis dans leurs droits par la Cour européenne des droits de l’Homme en 1999, pour que la question des thérapie de conversion soit évoquée dans le débat public au Royaume-Uni et que Peter Price trouve le courage de revenir sur son histoire personnelle.

« Ils ont cinquante ans de retard. Je me suis rétabli parce que je suis quelqu’un de solide, mais combien de personnes ont souffert en silence, combien ne s’en sont pas remises ? » enrage-t-il.

Selon l’étude du Bureau gouvernemental des égalités, ces thérapies sont conduites dans une majorité de cas (51%) par des groupes religieux, et, « dans une moindre mesure », par des professionnels de santé ou un proche (respectivement 19% et 16% des cas).