Loi Le texte sur le harcèlement sexuel devant le Sénat, objet d’un consensus gauche-droite

Le Sénat a examiné mercredi le nouveau texte de loi sur le harcèlement sexuel, qui prévoit une définition plus précise de ce délit et un alourdissement des sanctions, après l’abrogation il y a deux mois par le Conseil constitutionnel du texte originel.

Plus de 60 amendements ont été déposés, mais droite et gauche sont d’accord sur ce texte même si tous entendent élaborer un projet de loi irréprochable juridiquement.

Le gouvernement a décidé de recourir à la procédure accélérée (une lecture par assemblée) afin de parvenir à un vote définitif dès fin juillet.

C’est un projet de loi “important car il est question de dignité de la personne”, a déclaré la ministre de la Justice, Christiane Taubira, en le présentant aux sénateurs. “Il tient du symbole et de la volonté politique que ce soit le premier texte” examiné devant le Sénat, a-t-elle ajouté. Elle a assuré que la nouvelle définition du harcèlement sexuel permettra de couvrir “l’ensemble des situations concrètes”.

“Cette situation de souffrance sans recours nous oblige”, a ajouté Najat Vallaud-Belkacem (Droits des femmes) apportant son soutien à “celles qui ont vu les actions qu’elles avaient engagées s’éteindre brusquement”.

Le Sénat s’est fortement impliqué, avec pas moins de sept propositions de loi émanant de toutes tendances politiques, et un groupe de travail qui a longuement auditionné les parties.

La commission des Lois a ensuite largement enrichi le texte.

“Nous proposons une loi plus claire et plus précise avec un champ élargi de l’infraction” mais “comme toute loi, elle demeurera tributaire de l’interprétation de nos juridictions”, a souligné le rapporteur Alain Anziani (PS).

L’écologiste Esther Benbassa a lu une longue lettre émouvante d’une jeune universitaire décrivant sa souffrance et “le calvaire de son parcours judiciaire”. Elle a aussi souligné que ce délit “touchait également les hommes, les homosexuels, les lesbiennes et les transsexuels”.

Chantal Jouanno (UMP) et Muguette Dini (Union centriste) ont indiqué que leurs groupes respectifs voteraient pour le texte relevant l’absence de “divergences de fond”.

Le texte discuté en séance définit ainsi le harcèlement comme “le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos, comportements ou tous autres actes à connotation sexuelle qui, soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son égard un environnement intimidant, hostile ou offensant”.

Mais il prévoit aussi un cas de “chantage sexuel”, par exemple lors d’un entretien d’embauche ou l’attribution d’un logement, d’une promotion.

“Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user d’ordres, de menaces, de contraintes ou de toute autre forme de pression grave, dans le but réel ou apparent d’obtenir une relation de nature sexuelle, que celle-ci soit recherchée au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers”, indique le texte.

Ces deux délits sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende, portés à trois ans et 45.000 euros en cas de circonstances aggravantes (relation d’autorité, victime mineure de 15 ans ou vulnérable…).

La loi punit en outre d’un an de prison et de 3.750 euros d’amende le fait de discriminer une personne ayant subi ou refusé de subir le harcèlement.

A l’appel d’associations féministes, une petite centaine de personnes ont manifesté aux abords du Palais du Luxembourg, estimant qu’en l’état le texte n’est “pas satisfaisant”.

Ces associations redoutent notamment que le projet de loi -qui sera examiné par les députés le 24 juillet- et notamment le délit de chantage sexuel conduise à des déqualifications pénales de tentatives d’agression sexuelle ou de viol qui seraient de fait moins sévèrement punies.

Plusieurs sénateurs dont Chantal Jouanno ou Christian Bourquin, président PS de la région Languedoc-Roussillon, ont déposé des amendements proposant de supprimer l’alinéa créant un délit de “chantage sexuel”