Interdiction des « thérapies de conversion » : « la loi récemment votée renforce l’arsenal législatif dont nous disposons pour poursuivre les infractions LGBTphobes »

Le Parlement a adopté définitivement, mardi 25 janvier, la proposition de loi visant à interdire les « thérapies de conversion ». Le texte crée un nouveau délit dans le code pénal punissant ces pratiques de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Les peines pourront grimper à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende en cas de circonstances aggravantes.

Mise en œuvre, protection des victimes… STOP homophobie a interviewé Etienne Deshoulières, avocat au barreau de Paris, spécialiste des discriminations anti-LGBT, qui salue une « sacrée avancée » !

Le fait que l’ensemble des députés présents, de droite comme de gauche, aient voté pour cette loi est une très bonne chose. Le droit de vivre librement son orientation sexuelle ou son identité de genre n’est plus perçu comme une revendication communautaire. Il existe un large consensus politique. Les parlementaires voient désormais les droits des personnes LGBT comme des droits fondamentaux, auquel la pratique des thérapies de conversion porte atteinte. C’est un pas significatif ! Il faut quand même se souvenir qu’en 1960, les députés ont voté une loi définissant l’homosexualité comme un fléau social. L’homosexualité a été pénalisée en France jusqu’en 1982, par une loi voté sous Pétain en 1942. Ce n’est par ailleurs qu’à la fin des années 1990 que l’homophobie a commencé à être condamnée pénalement et que les homosexuels ont pu contracter des unions civiles, avec le Pacs voté en 1999. En 60 ans, la vision de qu’est l’homosexualité a complètement changé dans la société française en passant de fléau social à droit fondamental.

SH : Cette loi permettra-t-elle aux victimes d’agir plus efficacement ?

Oui, ellei constitue une avancée certaine, car auparavant, pour agir contre ces pratiques, il était nécessaire de se raccrocher à un délit connexe, tel que les violences morales ou la séquestration. Mais, dans les faits, les pratiques pouvaient perdurer, car il était difficile d’engager des poursuites pénales. Désormais, nous avons un outil juridique
adapté. Nous comptons bien nous en servir si des pratiques de thérapies de conversion nous sont dénoncées.

SH : Est-ce que cette loi permettra d’agir efficacement contre toutes les pratiques dites de « thérapies de conversion » ?

Oui, là encore, je pense que les termes de la loi sont suffisamment larges pour englober les différentes pratiques que l’on regroupe sous l’appellation « thérapies de conversion ». Je dirais même que la loi est rédigée de manière tellement large qu’elle permettra d’agir dans des situations qui ne relèvent pas des thérapies de conversions.

Par exemple, si une personne insulte deux fois une personne LGBT sur les réseaux en lui disant d’aller se faire soigner, alors ses propos tomberont sous le coup de la loi sur les thérapies de conversion. Ou encore, si des parents mettent leur fille lesbienne à la rue en la traitant de « sale gouine », alors là aussi, les parents pourraient être poursuivis pénalement sur le fondement de cette loi. Ce n’était peut-être pas son objectif principal, mais cela va nous servir dans notre action judiciaire quotidienne pour lutter contre les propos, les violences et les discriminations LGBTphobes. Cette loi renforce l’arsenal législatif dont nous disposons pour poursuivre les infractions LGBTphobes.