Fin d’un tabou ? A partir du printemps 2016, les homosexuels pourront donner leur sang mais sous conditions

« C’est la fin d’un tabou et d’une discrimination » : à partir du printemps 2016, les homosexuels pourront donner leur sang sous conditions, a annoncé la ministre de la santé Marisol Touraine, ce mercredi 4 novembre, dans un entretien accordé au Monde.

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Pour assurer la sécurité des transfusions, Mme Touraine veut « procéder par étapes » :

« Dans un premier temps, le don du sang sera ouvert aux homosexuels n’ayant pas eu de relations sexuelles avec un autre homme depuis douze mois. Les homosexuels pourront donner leur plasma s’ils sont dans une relation stable depuis quatre mois ou s’ils n’ont pas eu de relations sexuelles sur la même période.

Les premiers dons nous permettront de réaliser des études et, s’il n’y a pas de risques, les règles qui s’appliquent aux homosexuels seront rapprochées des règles générales l’année qui suit. Dans cette optique, nous allons réécrire les questionnaires à remplir lors d’un don de sang pour préciser les conditions pour les homosexuels, mais également pour les hétérosexuels ayant des pratiques à risques, par exemple avec des prostituées. »

« Si je comprends bien, c’est ok pour les gays qui seraient croyants mais pas pratiquants. Le ridicule n’est pas loin », a commenté Sergio Coronado, député EELV très engagé sur les questions LGBT. « Je me réjouis de la fin de l’exclusion, mais n’approuve pas les conditions », a regretté Jean-Luc Roméro, président d’Elus locaux contre le sida (ECLS).

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Pour le collectif Homodonneur, « c’est une insulte à la réalité »

Frédéric Pécharman, membre du collectif, explique à francetv info les raisons de cette colère.

« Elle nous propose un an sans relations sexuelles. C’est humainement inacceptable, aucune personne sur Terre ne peut vivre un an sans relations sexuelles. Pour nous, c’est une fausse mesure, hypocrite et scandaleuse. C’est même une insulte à la réalité de nos vies, doublée d’une régression. Nous avons toujours estimé que parler de l’abstinence était un pas en arrière ».

Qu’auriez-vous souhaité à la place ?

Ces derniers mois, on s’est battu pour le plasma sécurisé par quarantaine. Cela permettait de congeler le plasma pendant quelques mois pour s’assurer de son innocuité. C’était un vrai compromis pour étudier l’épidémiologie des donneurs homosexuels, pendant deux à trois ans.

Ils ont préféré partir sur l’abstinence sexuelle. C’est une mauvaise solution puisque les donneurs vont mentir sur la réalité de leur dernier rapport. Les chiffres seront donc mauvais. Je les soupçonne d’avoir pris cette mesure pour pouvoir dire : « Vous voyez, on a voulu faire un geste, ils [les donneurs homosexuels] ont menti, donc on continue de les exclure ».

Que comptez-vous faire ?

On nous a menés en bateau, nous allons donc reprendre nos actions. On lance un appel à toutes les associations, il faut maintenir la pression sur le gouvernement. Parce que si nous ne bougeons pas, ils vont croire que nous sommes satisfaits.

La levée de cette interdiction était une promesse de campagne de François Hollande et une demande de longue date des associations de défense des droits des homosexuels.

L’interdiction de donner son sang pour les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes est en vigueur depuis 1983. Elle est fondée sur une plus forte présence du VIH dans cette population et sur l’existence d’une « fenêtre silencieuse » de dix jours, pendant laquelle le virus est indétectable dans le sang collecté.