Des milliers de couples homosexuels légalement mariés aux Etats-Unis l’attendaient impatiemment: la Cour suprême a pris la décision historique vendredi de statuer sur le mariage gay, interdit au niveau fédéral mais reconnu dans neuf Etats américains sur cinquante.
Les neuf juges de la haute Cour se réuniront en mars pour entendre les différentes parties sur cette question explosive et rendront une décision vraisemblablement avant la fin de leur session, fin juin.
La plus haute juridiction du pays s’est saisie d’un recours concernant la loi fédérale sur le mariage. Cette loi de 1996, baptisée « DOMA » (Defense of marriage act), stipule que « le mariage est l’union légale entre un homme et une femme ».
« Aujourd’hui est un jour à marquer d’une pierre blanche pour l’égalité devant la loi », s’est réjoui Human Rights Campaign, la plus grande organisation militant pour le mariage gay. « Nous sommes ravis que la loi DOMA si pernicieuse et au nom si ridicule passe en justice ».
Le litige porte sur les droits que la loi accorde au niveau fédéral aux époux hétérosexuels (succession, abattements fiscaux, déclaration commune d’impôts, indemnités santé) mais refuse aux couples de même sexe, même légalement mariés.
La question divise, dans un pays où le président Barack Obama s’est ouvertement engagé en faveur du mariage homosexuel: neuf Etats américains et la capitale fédérale, Washington, l’autorisent depuis le 6 novembre mais 31 autres Etats l’interdisent dans leur Constitution.
Sur les dix plaintes qui lui étaient soumises, la haute juridiction a choisi l’affaire d’Edith Windsor, une homosexuelle légalement mariée au Canada, qui doit payer une taxe sur l’héritage de son épouse défunte. Ce recours a l’avantage de permettre à la juge Elena Kagan de siéger. Cette ancienne avocate du gouvernement aurait dû se récuser sur les autres litiges.
Cette affaire « aura des implications pour 50.000 à 80.000 couples qui sont déjà mariés et sont considérés comme des célibataires par le gouvernement fédéral à cause de la DOMA », déclare à l’AFP Lee Badgett, experte à l’université du Massachusetts.
Un jour à marquer d’une pierre blanche
La haute Cour devra trancher sur la constitutionnalité d’une loi que, paradoxalement, le gouvernement américain ne défend plus. Comme l’ont fait cinq Cours d’appel, l’administration Obama considère la loi comme discriminatoire et anticonstitutionnelle.
Dans ce dossier, « United States v. Windsor », les neuf sages devront dire si la loi fédérale viole le 5e Amendement de la Constitution sur l’égalité des droits par la loi. Elle se demandera en particulier si la position de l’administration Obama a une influence.
Contre toute attente, la haute Cour, de tendance conservatrice, statuera également sur le mariage homosexuel en Californie.
Elle s’est en effet saisie de la « Prop 8 », qui inscrit dans la Constitution californienne que le mariage est « entre un homme et une femme ». Un groupe de militants anti-gay conteste devant la Cour suprême l’interdiction de cette disposition par la justice.
Un rejet de cette plainte aurait immédiatement fait de la Californie le 10e Etat américain où l’union homosexuelle est légale.
Cette décision « affectera près de 100.000 couples de même sexe en Californie », estime Lee Badgett, selon laquelle 18.000 couples homosexuels sont déjà mariés dans cet Etat.
Dans cette affaire, « Hollingsworth v. Perry », la Cour suprême décidera si le 14e amendement de la Constitution sur l’égalité de protection interdit à la Californie de définir le mariage comme l’union entre un homme et une femme.
Le Centre pour le progrès américain (CAP) s’est dit « confiant » que la haute juridiction « reconnaîtra ce que les juges les plus conservateurs ont déjà reconnu: que la discrimination contre les couples de même sexe est anticonstitutionnelle et doit s’arrêter immédiatement ».