Elles préparent leurs noces : Fiancées depuis un an, sans attendre le vote de la loi, Ludivine et Léa ont déjà choisi la date de leur mariage. Ce sera le 31 août à Héricourt.

Les faire-part de mariage sont déjà imprimés. La salle des fêtes est louée. Le traiteur et le DJ sont retenus… « C’est immuable. Si la loi du mariage et l’adoption aux couples homosexuels est promulguée, on se marie le 31 août, à 17 h, à la Roseraie d’Héricourt », annoncent Ludivine Cartigny et Léa Bouleau, tribades.

Et si la loi ne l’est pas, « on se pacsera, mais la fête sera maintenue », sourient les deux jeunes femmes. Elles attendent, à la fois avec confiance et anxiété, la publication de la loi du mariage pour tous. En février, Léa, Ludivine et son fiston étaient dans le cortège de la manifestation du mariage pour tous à Strasbourg.

Dès la mi-février, lorsque ce projet de loi fut adopté en première lecture à l’Assemblée nationale, « on est allées voir le député-maire Jean-Michel Villaumé ». Fiancées depuis un an, elles sont impatientes d’officialiser leur union. « Il nous a dit que d’ici fin juin, la loi devrait être officielle. On croise les doigts ! ».
« On souhaite que ce soit bien fait »

Elles sont reparties de la mairie avec tous les documents à remplir. « On préfère le mariage, plutôt que le Pacs, car trop impersonnel, ça se passe au tribunal dans un bureau », soutiennent-elles. Passer devant le maire, elles y tiennent comme à la prunelle de leurs yeux. « On souhaite surtout que ce soit bien fait », glissent-elles. Ce mariage, Ludivine Cartigny, sait au plus profond d’elle-même qu’« il sera plus joli, mieux organisé que ma première union avec mon mari ». Un époux dont elle s’est séparée depuis quelques années, avec qui elle a eu un enfant âgé de 8 ans.
« Je la voyais en cachette »

Ludivine, trentenaire, parle aujourd’hui librement de son homosexualité, mais ce ne fut pas toujours le cas. « Psychologiquement, c’est très dur. » « Dès mon adolescence, j’ai ressenti une attirance pour les filles ». Sa première copine ? Ludivine avait 15 ans. « J’étais malheureuse et j’avais honte. Je la voyais en cachette. Je n’osais pas affronter ma famille », raconte-t-elle. « Je me suis mariée. J’ai eu un enfant. Mais il marchait à peine, lorsque j’ai pris la décision de divorcer. Je n’en pouvais plus de tricher avec les miens et surtout avec moi-même ».

Peu après son divorce, la jeune femme, « plus mature », décide d’assumer son homosexualité et de l’annoncer à ses huit frères et sœurs. « Je craignais la réaction de ma sœur aînée. Au décès de maman, c’est elle qui m’a élevée. Je lui ai annoncé au téléphone, je n’ai pas eu le courage d’affronter son regard. Mais ma famille est formidable. “On t’aime comme tu es”, m’ont-ils dit ».

La relation entre Ludivine et Léa, date d’il y a deux ans, via « un site de rencontres ». « Je l’ai invitée à venir chez moi, elle n’est jamais repartie à Strasbourg », se remémore Ludivine.

À la différence de Ludivine, Léa, 23 ans, dit avoir toujours assumé « ma différence, sans sentiment de culpabilité. Adolescente, j’ai eu des amoureux, mais je n’étais pas attiré par les hommes. Mes parents ne m’ont jamais reproché quoi que ce soit, “du moment que tu es heureuse, c’est l’essentiel” », m’ont-ils dit.

« Ma séparation, pendant et après, se passe très bien avec mon ex-mari, nous sommes restés amis et aujourd’hui, on s’entend tous ensemble et le gamin est épanoui », glisse Ludivine.
Marche vers l’égalité

« Vous savez, que ce soit avec des parents “normaux” ou “homosexuels”, lorsque les enfants bénéficient de tout l’amour nécessaire c’est l’essentiel. Mon fils est très heureux ». Heureuse, Ludivine, l’est aussi, « je suis bien dans ma tête. Et vit pleinement ma relation avec Léa ». Quant au regard des autres, certes elles font attention, ne s’exhibent pas, mais il arrive parfois que dans la rue des personnes les regardent avec insistance, « surtout les personnes âgées ». En ménage depuis plus d’un an, Ludivine et Léa partagent toutes les tâches de bricolage et ménagères. « On a les mêmes loisirs, la pêche, la moto. On a passé notre permis deux roues ensemble », sourient-elles.

Le mariage pour tous, c’est une marche vers l’égalité, que l’une et l’autre désirent plus que tout. « Nous regrettons que l’Église ne l’accepte pas. Une exclusion qu’elles veulent contourner ce31 août, en organisant une cérémonie nuptiale dans la salle des fêtes d’Argiésans avec tous les invités, une centaine de personnes ».

source:estrepublicain.fr