Tribune : La législation homophobe viole l’islam et son éthique

Revue de presse : L’homophobie n’est pas islamique : Pour une dizaine de “l’homosensualité” maghrébine à partir du 22 avril.

Qui dans la communauté gay et au-delà n’a pas entendu parler d’Ihsane Jarfi, ce jeune Marocain victime, en Belgique, d’un terrible crime relevant de l’homophobie primaire? Perpétré aux premières heures de la journée du 22 avril 2012, cet effroyable forfait a été dénoncé en Belgique, lieu du crime, et partout dans le monde, y compris dans son pays d’origine, le Maroc.

Les Marocains ont d’ailleurs été très sensibles au drame de leur compatriote, surtout à cause de ses hautes qualités morales et humaines qui faisaient l’unanimité, le jeune homme étant l’innocence même, un parfait musulman pratiquant.

L’âme de Jarfi réclame justice à son pays

Le drame a connu son épilogue judiciaire à la fin de l’année dernière, avec la condamnation des malfaiteurs par la cour d’assises de Lièges, à une peine exemplaire. Il ne reste pas moins que la mémoire du jeune Jarfi n’a pas eu la réhabilitation méritée auprès des autorités du pays dont il est issu; aussi, son âme réclame-t-elle encore justice.

Une telle justice faisant encore défaut serait dans la reconnaissance par les autorités marocaines du droit des gays, les semblables d’Ihsane Jarfi, de vivre en toute quiétude leur homosensualité (c’est le terme que je propose pour le substituer au terme habituel, par trop connoté sexe).

En effet, la loi, au Maroc, fait de l’homosensualité un délit, l’article 489 du Code pénal condamnant les homosensuels à des peines de prison allant de 6 mois à trois ans ou à des amendes allant de 120 à 1200 DH.

C’est une telle loi injuste qui a privé le jeune Jarfi, durant sa courte vie, une fois sa spécificité sexuelle avérée, de se rendre dans un pays qu’il chérissait plus que tout, la peur de ses parents de le voir emprisonné l’en ayant empêché.

Ce droit, l’âme du jeune homme le réclame aujourd’hui. Ainsi, celui qui se rendait sur sa tombe à Liège pour s’y recueillir pouvait s’en rendre compte. Voici ce qu’en dit son papa, Hassan Jarfi dans le tombeau qu’il a offert à son fils chéri « Ihsane Jarfi, le couloir du deuil » pour défendre sa mémoire : « …curieusement, chaque fois que j’arrive au cimetière, un oiseau vole au-dessus de ma tête, plusieurs fois en poussant des cris. Je sais qu’il existe une relation entre les âmes et les oiseaux » (p. 126).

Ce que M. Hassan Jrafi ne dit pas, c’est que, d’après la légende arabe, l’âme du mort injustement tué continue à réclamer justice, en se transformant en ce qu’on appelle Hama هامة c’est-à-dire une chouette ou un petit hibou ; ainsi elle continue à voleter au-dessus de la tombe jusqu’à ce que justice lui soit rendue. Voici d’ailleurs le détail de la légende :

تزعم العرب أن روح القتيل الذي لم يدرك بثأره تصير هامة فتزقو عند قبره تقول : اسقوني، تسقوني ! فإذا أدرك بثأره طارت. وهي نوع من البوم الصغير تألف القبور وتسمى أيضا الصدى.

Haro sur l’homophobie !

Des lois similaires à la législation marocaine existent dans tout le Maghreb. Ainsi, en Tunisie, l’article 230 du Code pénal prévoit une peine de 3 ans de prison pour les personnes jugées « coupables » de pratiques homosexuelles. En Algérie, c’est aussi bien l’article 333 du Code pénal sanctionnant l’« outrage public à la pudeur » que l’article 338 mentionnant spécifiquement l’homosexualité qui sont utilisés en arme homophobe.

Il est à noter que ces lois datent toutes de la période coloniale et manifestent moins une inspiration islamique que la résilience du colonialisme. En effet, l’islam n’est pas homophobe, je l’ai d’ailleurs démontré dans des livres, dont j’ai rendu compte ici.*

En fait, aujourd’hui, la législation homophobe viole l’islam et son éthique n’étant qu’un moyen pour les autocrates au pouvoir d’émasculer les élans de la jeunesse à vivre librement.

algerie-focus.com