« A tous ceux qui se cherchent ou se découvrent hors des clous et standards : il y a beaucoup de couleurs dans ce monde ! »

C’est ce qu’on me renvoie aujourd’hui.
Ici, là, souvent.
Ces mots. Une belle famille.
Ces mots si difficiles à atteindre.
Ces mots qui se méritent, qui se gagnent encore, tous les jours.

J’ai envie de dire à la directrice de la crèche qu’on s’en contre fiche de qui est la maman « biologique » de mes filles. Qu’elle peut nous parler à toutes les deux et pas uniquement à moi, même si, oui c’est un combat, encore, que de n’être que l’unique représentant légal pour l’instant. Et de lui répondre, simplement, à comment elle doit appeler ma compagne, « Maman ».

J’ai envie de dire à tous ces manifestants de 2013, combien ils ont fait du mal, combien ils en font encore mais surtout combien ils ont eu tort.
Que le monde ne s’est pas écroulé après le vote de la loi sur le mariage pour tous, l’inceste et la polygamie n’ont pas été légalisés et que les scandales qui font tant de mal aux enfants viennent plutôt du diocèse de Lyon que de nos salons.

J’ai envie de dire un énorme merci aux médecins, au pluriel et surtout à une en particulier, qui nous ont aidé dans cette démarche, en dépit du mauvais sens, et de l’hypocrisie de la loi française actuelle, et nous ont permis de fonder cette famille. Eux qui, à défaut de droit ont pris le gauche, comme, entre autres, ces 130 signataires d’un manifeste pour une vraie réflexion éthique et globale sur l’aide à la procréation.

J’ai envie de dire à la maman que je suis devenue, cette première nuit, mémorable de Juin 2010, qui est rentrée chez elle à l’aube son bébé dans les bras, pleine de doutes et de confiance à la fois, qu’elle a bien eu raison, que c’est son instinct qui a toujours eu et aura toujours raison, et qu’elle va devenir une sacré chouette maman.

A celle que j’étais deux ans après, qui tenait la main d’un petit blondinet très courageux dans son lit d’hôpital qu’il faudrait se battre mais qu’il était, évidemment, son fils, no matter what, peu importe ce que le faux livret de famille disait et que, le vrai, avec tous les noms dessus, allait bientôt arriver.

Et à celle, allongée, bloquée sur son canapé, qui avait mal, et peur l’été dernier, que non, ça n’allait pas capoter, et que bientôt, elle serrerait dans ses bras non pas une, mais deux petites « filles de septembre », toutes les deux aussi belles l’une que l’autre, parfaites et conformes en tout point à ce que sa chérie avait commandé.

J’ai envie de dire à la jeune fille que j’étais, de s’accrocher, que le meilleur était à venir, vraiment. Que cette nuit qui m’a paru si difficile en 2002 n’était que le début d’un grand changement cosmique qui allait remettre ma vie à l’endroit, me faire retrouver mes amis, en rencontrer d’autres, trouver le métier qu’il me fallait vraiment et la femme aussi, accessoirement.

J’ai envie de dire à tous ceux qui se cherchent, ou se découvrent, hors des clous ou des standards, qu’il y a beaucoup de couleurs dans ce monde là, du pink, des arc en ciel et tellement d’autre chose. Et que au final, le rose, le bleu, les goûts et les couleurs.. c’est tellement personnel, qu’il suffit d’écrire l’histoire qu’on a en soi, et de faire en sorte qu’elle soit belle.

J’ai envie de dire à mes parents, et à mes beaux-parents, qui ne l’ont pas montré mais qui ont pu, peut-être, s’inquiéter du futur quand ils ont appris, compris que nous nous aimions ma chérie et moi, que ça y est, on l’a fait. Que leurs craintes de ne pas avoir de petits enfants, que notre vie soit difficile, n’étaient certainement pas infondées, car oui difficile ça l’a été, mais oubliées  car avec une telle Famille rien d’impossible.

J’ai envie de dire à ma chérie, que je sais que tout n’a pas toujours été rose, qu’il y aura certainement encore des jours gris, mais que je crois qu’on peut dire que, jusque là, on a plutôt pas trop mal gardé le cap dans toutes ces tempêtes. Que j’ai peut-être un peu exagéré en disant ce jour d’été dans le parc royal de Bruxelles qu’il ne faudrait pas trop tardé si on voulait un jour réussir à avoir des enfants (hmm hmm) mais qu’au final, c’est quand même super chouette de pouvoir avoir encore un peu de jeunesse et d’énergie pour affronter tous ces lardons, et se dire qu’on pourra profiter de notre retraite vu qu’ils seront grands 😉
Et surtout, que, tout ça, eux, tous les quatre, moi, chacun de leur succès, chacun des miens, n’aurait pu avoir lieu sans elle.

J’ai envie de dire et de redire à mes enfants que je les aime, tous les quatre.
D’un amour indescriptiblement descriptible.
Que je suis là, pour tous les jours, les bons où on danse comme des zinzins sur Katy Perry du chocolat jusqu’aux oreilles et les mauvais où ma voix est trop forte, que je suis fatiguée et que j’ai, comme dit mon fils, les yeux qu’on dirait qu’ils ont pleuré.
Que chacun à leur tour, comme autant de chansons sur lesquelles ils sont venus au monde, Ben Harper, Jason Mraz, Pink et Keane, je m’efforcerai de leur donner, à tous, de façon singulière, les armes pour affronter ce monde, dans toute sa beauté cruelle parfois. De les accompagner, pas à pas, dent après dent, pour qu’ils deviennent pompier des forêts payé par le PSG, percusionniste danseur violoncelliste ou whatever, ce que la petite voix à l’intérieur d’eux leur dira d’être, et même un peu plus.
Qu’il faut continuer de rêver, de pleurer, de rire, de crier, de sauter, et surtout, d’aimer. Toujours. Et se le dire, et le répéter encore.

Une belle famille.

Une de celle qui rentre pas dans les cases avec deux mamans, trois mamies, une lolo, autant de papy et un papou, des tatas, des tatouilles, des tontons, des cousins, des cousines, des grandes, des petites, un vrai arbre avec tellement de branches qu’on a du faire en DIY et peindre sur le mur de la chambre parce qu’on en trouve pas des comme ça.

Une de celle qui a emmené ses quatre enfants sur les gratte ciel de New York chacun une fois avant qu’ils ne sachent marcher.
Car si tu n’as pas vu Times Squares à 13 mois tu as raté ta vie 😉
Une de celle qui connait la collection Truky, de bagages pour enfants, par coeur et qui peut faire tenir des habits pour 6 pour une semaine dans une seule grosse valise.
Des voyageurs dans l’âme pour apprendre que c’est de la différence de l’autre qu’on apprend le plus.
Dès la grossesse déjà, avec la saveur des wurst de Munich pour l’un, les tapas barcelonaises pour l’autre, les tonnes de Key Lime Pie et les Danish pastries pour les deux autres.

J’aie une ouïe sélective pour les compliments, mais je les entends parfois…
La pédiatre, les copines, les collègues, l’autre pédiatre, les copines maman d’école, la maîtresse, l’atsem.. « Une belle famille ».

De ça non je n’ai jamais douté.
De moi? Si peu..
Mais c’est toujours pareil, il faut tellement de beaux mots pour réparer ceux qui ont tant blessé.
Pour moi, pour m’en persuader, pour me réparer, je vais me le répéter encore un peu.
Et aussi comme un pied de nez à tous les septiques, les homophobes, les arriérés, aux préjugés, aux mal…
Le répéter, le revendiquer, le crier, encore…

On est une famille qui déchire !

Par Linem B, co-créatrice du blog Puisque c’est la guerre