Pas né dans le bon corps, j’ai passé mon adolescence à en changer

Opérations, démarches administratives… le chemin a été long pour devenir un homme. Je veux le raconter pour aider les autres à nous aider.

En apparence, je ressemblais à tous les autres enfants.

Je jouais au foot avec mes copains, je courais après les petites filles en les taquinant, j’en tombais amoureux comme on peut l’être à 5ans, j’adorais mes figurines Batman et mes déguisements de Zorro.

Tout allait bien, jusqu’au moment où la maîtresse d’école a prononcé mon prénom, Laura, en me disant que je ne devais pas m’amuser avec les garçons parce que ce n’était pas mon « monde ». Foudroyante prise de conscience. Merde, je suis une fille ?

Ce jour-là, j’ai appris à jongler entre deux existences. Vêtements masculins, coupe courte et gel dans les cheveux, j’essayais tant bien que mal de conformer mon physique à celui que j’avais dans la tête.

J’entendais mes parents parler de moi au féminin et faire des projets pour mon avenir de jeune femme, mais leurs paroles sonnaient faux.

Ma mère me disait souvent « ne va plus chez le coiffeur et arrête de t’habiller comme ça » et mon père, à la fois tendre et cruel, me répétait sans cesse que j’étais sa « princesse ».

A la puberté, le cauchemar a commencé

A la puberté, mes copains grandissaient, pas moi. Leur voix muait, pas la mienne. Ils prenaient du muscle, pas moi. Leurs barbes poussaient, pas la mienne, sans parler de règles et de poitrine.

Bref, le cauchemar a commencé, sans que je puisse y changer quoi que ce soit et surtout sans que personne, à commencer par moi, ne comprenne pourquoi « Laura » n’était pas une fille comme les autres.

La révélation a eu lieu vers 17 ans, quand j’ai compris que je n’étais plus seul au monde. Jusque-là, je ne me voyais pas dire à quelqu’un que j’étais un homme coincé dans un corps de femme.

C’est dans un show de téléréalité que j’ai trouvé mes réponses, une émission où chaque candidat doit cacher un secret plus ou moins intime. Ce jour-là, stupéfait, j’ai compris que mon histoire était aussi celle d’un autre. J’étais à la fois euphorique et anxieux, car je ne comprenais pas pourquoi le jeune homme en question se disait « transexuel ».

J’avais longtemps entendu ce terme sans m’y pencher vraiment, et en lui attribuant un sens péjoratif. Pour moi, un « trans », c’était un travesti qui se prostituait, et idéalement dans le bois de Boulogne. J’ai passé des nuits entières sur le blog de ce participant pour trouver des réponses.

Voilà qui était clair, j’étais donc transexuel

Un transexuel n’était en réalité qu’une personne souffrant du syndrome de Benjamin. Dès 1869, le psychiatre austro-hongrois Richard Von Kraft-Ebing avait tenté de faire la distinction entre « transexualité » – qu’il ne nomme pas encore ainsi – « homosexualité » et « travestisme ».

Mais c’est l’endocrinologue et sexologue américain Harry Benjamin qui, après la Seconde Guerre mondiale, a décrit avec justesse la réalité du syndrome, « une entité nosographique qui n’est ni une perversion, ni une homosexualité, le sentiment d’appartenir au sexe opposé et le désir corrélatif d’une transformation corporelle ». Voilà qui était clair, j’étais donc transexuel.

Un beau jour de juin2008, quelques semaines après mes 18ans, l’occasion rêvée de faire mon vrai coming out s’est présentée. Une cousine, très coquette et féminine, était en train de se faire maquiller par ma maman, esthéticienne de profession.

« Lolo, pourquoi tu ne te fais pas maquiller comme moi ? Allez viens, essaie, ça t’irait bien. »

Avachi sur mon canapé devant un match de foot, j’ai senti mon cœur exploser, dans un mélange de rage et d’incompréhension. Après plusieurs refus, ma mère s’est avancée et m’a posé la question qui lui brûlait les lèvres depuis ma naissance : « Mais qui es-tu vraiment ? »

Les psys posent des milliers de questions

C’était maintenant ou jamais. Dans un élan de courage, je lui ai tout simplement répondu que j’étais son fils. Je me rappellerai jusqu’à ma mort de son regard vide, triste, comme si le ciel lui tombait sur la tête, sans que cela ne la surprenne vraiment.

« Tu ne vas pas te faire charcuter, c’est hors de question, je vais t’emmener voir quelqu’un pour en parler. »

Sans le savoir, elle m’a donné les clés de ma transition.

Quelques mois plus tard, j’avais rendez-vous à l’hôpital, dans un service psychiatrique spécialisé en sexologie, au milieu de quelques internés, enfermés dans leur camisole. « Qu’est-ce que je fous là ? », me suis-je répété incessamment dans la salle d’attente.

Il faut le dire, avec tout le respect dû aux personnes souffrants d’un trouble mental, et malgré toute la dignité que je leur attribue, je ne comprenais pas.

Et puis je m’y suis habitué. J’ai été suivi pendant plus d’un an dans ce service par plusieurs psychiatres et psychologues, j’ai répondu à des milliers de questions à l’écrit et à l’oral, participé à des entretiens très durs.

La puissance de mon mal-être et mon désir de vouloir changer de sexe ont été rudement mis à l’épreuve. Pourtant, « désir » n’est pas le mot qui convient, il s’agit plutôt d’une nécessité vitale qui m’a permis, tout simplement, de ne pas me foutre en l’air.
Première injection de testostérone, fragment de vie et d’espoir dans mes veines

Au bout de cette année interminable, et après de nombreuses prises de sang et autres tests physiques, la première étape de ma transition m’a été remise en mains propres : mon ordonnance hormonale.

Au grand désespoir de mes parents, sous le choc, j’ai reçu ma première injection de testostérone.

Effet placebo, aucune douleur. Plutôt un fragment de vie et d’espoir dans mes veines.

Deux piqûres par mois, et les premiers changements sont apparus, ma voix, ma pilosité, de petites choses qui allaient enfin me rendre ma liberté, ou presque.

Que diront les gens dans la rue en voyant un homme avec une poitrine ? Il fallait trouver une solution.

Je me suis donc procuré des gilets de contention, l’accessoire indispensable de tous les « FtM » (« Female to Male », « de femme vers homme », le terme dédié).

Epaules lacérées, difficultés à respirer, c’était insupportable et très compliqué à enfiler, mais qu’importe, je renaissais peu à peu. Le bonheur de se lever le matin était quelque chose que je n’avais jamais vraiment connu.

Entre deux déraillements de voix dus à une mue plus que rapide, j’ai pris plaisir à sortir boire un café, à flâner dans les magasins, avec toujours l’étrange sensation d’être « incognito », en sous-marin, comme si la transition était palpable par toutes les personnes qui croisaient mon regard, sans qu’il n’y ait plus de signe visible qui me distingue d’un homme « biologique ».

Si l’appréhension de marcher dans la rue me quittait peu à peu, le simple fait d’aller chercher un colis ou retirer un chéquier à la banque me demandait beaucoup d’efforts.

L’adaptation de mon corps et de ma tête se déroulait plutôt bien, mais mes papiers d’identité, eux, me ramenaient toujours à l’effroyable réalité.

Comment allais-je expliquer, au guichet, que le prénom inscrit sur la carte est bien le mien, que c’est bien moi, sans l’être ?

Pareil pour le passeport, la carte bleue, bref, l’ensemble de ces foutus documents qui faisaient de moi quelqu’un d’autre.

A ce moment-là, j’étais inscrit à la fac, c’était ma première année post-bac, autrement dit une période charnière durant laquelle j’allais devoir décider de mon avenir professionnel.

Et je m’en foutais. Je faisais des études parce qu’il fallait en faire, et j’avais choisi l’université en pensant pouvoir me fondre dans la masse entre deux bancs d’un immense amphithéâtre. Faux espoir.

Inscrit en espagnol, je me suis retrouvé dans une petite classe, où la proximité entre élèves et professeurs était grande.

La pire claque « administrative » de ma vie m’a été donnée par une enseignante qui vérifiait l’identité des candidats aux examens.

Son regard a fait près de dix aller-retour entre ma carte d’étudiant et mon visage, avant que cette prof agrégée ne balance haut et fort : « Y a comme un problème, là, non ? » « Non, c’est bien moi », ai-je répondu, devant mes camarades surpris.

« Il va falloir songer à porter une perruque, vous allez avoir du mal dans votre vie. » Nous étions démolis, moi et le peu d’ambition professionnelle qui m’habitait encore.
Un dossier béton pour changer d’état-civil

Sur Internet, j’avais pu lire que la demande de rectification d’un acte d’état-civil pouvait être accordée au demandeur après un traitement médico-chirurgical – comprendre : prise d’hormones et stérilisation.

Mais à ce moment, je ne remplissais qu’un seul de ces deux critères. L’équipe médicale qui me suivait depuis le départ m’a alors conseillé de contacter une avocate.

Bingo, même si l’hystérectomie (ablation totale de l’utérus) n’était pas encore d’actualité, je pouvais déjà changer de prénom. Joie !

En quelques jours, cet hiver 2009 s’est transformé en une chasse aux preuves : photocopies des ordonnances hormonales, attestations de proches stipulant que je refusais l’attribution du prénom féminin, photos d’enfance pour justifier mon identification précoce au sexe opposé et bilan psychiatrique.

Les démarches m’ont coûté près de 1500euros en frais d’avocat. Mais j’ai déposé un dossier béton, presque une autobiographie, qui a suffi pour qu’une mention soit apposée sur mon acte de naissance.

Grâce à elle, j’ai obtenu, en septembre2010, un prénom convenable. J’ai choisi Laurent, non pas pour conserver un pied dans le passé, mais plutôt pour alléger le deuil de mes parents et mes proches.

C’était bien d’un deuil qu’il s’agissait : leur fille était morte, et il fallait faire passer la pilule en douceur.

Je n’avais aucune affection particulière pour ce prénom auquel je n’étais pas vraiment habitué, mais j’étais soulagé de pouvoir toujours me faire appeler « Lolo ». Ma carte d’identité est alors devenue bancale.

Y figurait mon nouveau prénom, suivi de celui de mes deux grands pères – oui, j’ai pu choisir mon deuxième et troisième prénoms, ce n’est pas donné à tout le monde.

Mais sur la ligne sexe était toujours indiquée la lettre « F »…

Le parcours s’est déroulé à son rythme, sans embûches. Certes, il a pris du temps et bouffé une partie de ma jeunesse et ses belles années. J’ai cependant eu la chance d’habiter Marseille, et d’être encadré par une équipe organisée pour tout prendre en charge, hormis les frais juridiques.

D’autres personnes transexuelles m’ont raconté des parcours plus chaotiques, dans le secteur privé, avec de nombreux déplacements pour obtenir des consultations dans toute la France.

Dans mon cas, tous les spécialistes travaillaient ensemble, des psychologues aux endocrinologues en passant par les chirurgiens et anesthésistes. Ils se réunissaient en commission deux fois par an afin de valider chaque étape, au cas par cas.

C’est ainsi que j’ai réussi à obtenir l’accord pour la première intervention, celle qui allait me rendre ma liberté.

« Impossible, aucune fille n’admettra d’être un homme avec des seins »

Depuis plusieurs années, je n’allais plus à la plage, je souffrais de la chaleur, le gilet compressif providentiel devenait peu à peu un fardeau qui m’empêchait de m’habiller comme je voulais.

Et, bien entendu, le garçon hétéro qui dormait en moi depuis toujours n’avais pas trouvé l’amour et le réconfort d’une douce et belle jeune fille. « Impossible, personne ne supportera un homme avec des seins, aucune nana ne peut admettre ça, », me disais-je.

Je ne cherchais même pas, c’était perdu d’avance. Le 18novembre2010, second rendez-vous avec le chirurgien, accompagné de ma mère qui, au fil du temps, avait appris, non sans mal, à aimer son fils.

Elle était à la fois morte d’inquiétude et euphorique à l’idée de me voir enfin « casé » dans un genre « fixe ». Elle savait que plus personne ne lui demanderait si j’étais un garçon ou une fille, une question qui a marqué les vingt premières années de sa maternité.

« Votre mastectomie bilatérale est prévue pour le 14juin2011. » Immense déception, pour nous deux. J’allais encore devoir attendre sept mois avant d’être opéré, les sept mois les plus longs de toute mon existence.

Entretemps, j’ai intégré une société de commerce électronique, cornaqué par mon grand-frère, histoire d’acquérir un peu d’expérience dans le monde du travail et de mettre fin à une grande période d’oisiveté dévastatrice.
A l’hôpital, mélange de peur et de bonheur

Et puis, le grand jour est arrivé. Accompagnés de mes amis qui avaient réussi, tant bien que mal, à s’adapter à ma nouvelle identité, je suis rentré, le lundi 13juin, à l’hôpital de la Conception pour y « subir » ma première opération. Stress, angoisse, montée d’adrénaline, un mélange de peur et de bonheur intenses.

J’ai pris ma douche à la Bétadine, puis j’ai erré dans les couloirs du service en espérant que les heures restantes allaient passer le plus vite possible. J’ai enlevé mon gilet compressif pour la dernière fois, un moment très solennel, sous les yeux brillants de mon meilleur ami venu passer la nuit avec moi, allongé sur deux fauteuils inconfortables.

Une dernière cigarette, puis un Atarax, un calmant salvateur qui m’a permis de fermer l’œil quelques instants. Au matin, les brancardiers sont venus me chercher pour me faire rouler jusqu’au bloc.

C’était le premier jour du reste de ma vie. Je me suis réveillé, presque six heures plus tard, dans un état lamentable, affublé d’un immense pansement très serré et de drains thoraciques reliés à des petites poches dans lesquelles mon sang s’écoulait.

Qu’importe, j’étais heureux, libre, dévasté mais reconstruit.
Exister enfin, sans contrainte et sans douleur

Quelques mois auparavant, j’avais fait la connaissance de Claudia, parfaitement au courant de ma situation. Des câlins, une affection naissante, des heures de discussions au téléphone entre deux restaurants, mais une relation que je ne parvenais pas à concrétiser.

Le fantôme de mon ancienne vie me hantait, et l’idée de faire partager mon quotidien à quelqu’un ne m’avait pas effleuré l’esprit depuis un bon moment.

Deux jours après l’opération, elle est venue poser sa tête sur mon torse tout neuf, dans ma chambre d’hôpital. Une visite marquée par un premier baiser, et surtout par le début d’une belle histoire qui dure maintenant depuis près de deux ans.

C’est avec elle que j’ai découvert les joies de mes premiers bains, et que j’ai eu la sensation d’exister enfin, sans contrainte, sans douleur, en harmonie presque totale avec la personne que j’étais vraiment.

Cependant, pour mes proches, tout n’était pas clair. L’orientation sexuelle est-elle corrélée à l’identité ? Doit-on évoquer la sexualité en fonction du sexe biologique ou du sexe ressenti ?

Il a fallu expliquer tout ça à mon entourage, qui m’avait toujours considéré comme une fille homosexuelle. C’est grâce à ma psychologue attitrée que j’ai réussi à trouver les mots :

« Une fois que l’on considère la personne dans son sexe psychologique, on ne retrouve pas de spécificité dans le comportement sexuel. Elle présente une sexualité similaire à la population générale.

Un homme transexuel est donc considéré comme hétérosexuel s’il sort avec une fille, et inversement. »

Je l’avais toujours su, mais il est toujours plus simple de s’appuyer sur une version concrète dont la source se révèle fiable, c’est l’éternel mythe de la « blouse blanche ».

Bref, cet été-là, j’ai redécouvert ce que je connaissais déjà en profitant de chaque instant, en dévorant chaque minute comme si je n’avais jamais vécu, et c’était le cas.
Je me suis dit « pour l’instant, tu n’as fait que changer de sexe, bouge-toi le cul »

A partir de là, tout s’est enchaîné à une vitesse incroyable. Trois mois plus tard, j’ai été stérilisé, un acte délicat, douloureux, qui peut sembler barbare.

Pourtant, même si j’ai renoncé ce jour-là à donner la vie comme la nature me l’avait permis, je n’ai pas pour autant abandonné l’idée d’être un jour papa. Un sacrifice qui n’en était pas vraiment un, dans la mesure où il était inconcevable pour moi de porter un enfant.

Au-delà de l’aspect chirurgical, j’ai ajouté le précieux compte-rendu de cette intervention à mon dossier juridique. Une nouvelle pièce indispensable pour harmoniser une bonne fois pour toutes mon corps et mon état-civil.

C’est aussi le moment où je me suis dit « pour l’instant, tu n’as fait que changer de sexe, bouge-toi le cul ». Dans un sursaut, je me suis motivé à reprendre les études, et j’ai intégré l’Ecole de journalisme de Marseille quelques semaines après ma sortie de l’hôpital.

Ouf ! J’avais trouvé ma voie, pour le plus grand bonheur de mes parents.

Si j’ai réussi à reprendre les choses en main, c’est avant tout grâce à une transition tournée vers le dialogue. A l’époque du lycée, j’ai compris que me mettre en marge de la société ne servirait à rien.

Je me suis plongé dans une espèce de bouillon permanent, un genre de « sur-sociabilisation » qui m’a obligé à affronter les regards, les questions, et surtout à y répondre.

Avant de subir les moqueries, avant de laisser les mauvaises langues et les réfractaires ouvrir une brèche et s’y engouffrer pour alimenter les ragots et faire de cette différence une attraction, mieux valait leur expliquer, leur raconter, leur couper l’herbe sous le pied sans tomber dans la justification ou le repentir.

L’idée, ce n’était pas forcément de prêcher pour ma paroisse en donnant des leçons de tolérance – être accepté de tout le monde relève de l’impossible. Non, l’idée, c’était au moins de laisser une chance de comprendre à ceux qui le voulaient bien, et surtout, de leur en donner les moyens. Pourquoi être agressif face à quelqu’un qui ne saisit pas tout, qui s’interroge ?

J’ai été moi-même intolérant par moments

Pourtant, je suis aussi tombé là-dedans, j’ai aussi eu des failles, j’ai été moi-même intolérant, à certains moments, envers ce que j’appelle « les erreurs de langage », j’ai condamné précipitamment mes amis, ma famille, pour un passage du pronom « elle » au pronom « il » que je jugeais trop lent.

Ma souffrance était plus importante que la leur, j’avais déjà perdu assez de temps pour me résoudre à les laisser s’adapter, il me fallait tout, tout de suite. C’était une erreur.

Quelques mois de silence ont suffi à me faire réagir, j’ai compris qu’ils ne pouvaient pas changer leurs habitudes du jour au lendemain.

La solution de facilité aurait été d’abandonner tout ce que j’avais construit, tout l’entourage que j’avais côtoyé, mais j’aurais sûrement été hanté, toute ma vie, par deux existences que je n’aurais pas su conjuguer.

Aujourd’hui, bien que le parcours ne soit pas terminé en vue de la dernière étape chirurgicale, la priorité reste à la construction de ma vie professionnelle, trop longtemps laissée au placard.

Pour autant, je n’oublie pas mon vécu, et il est essentiel, à mon sens, de garder présentes à l’esprit les conditions dans lesquelles je suis venu au monde.

A quoi bon tenter de tirer un trait sur un passé que je ne pourrais jamais changer ? Pourquoi enlever à ma maman les photos de mon enfance ?

Le déni ne servirait à rien, accepter ne m’empêche pas d’être un homme accompli, qui marche tranquillement dans la rue aux bras d’une jeune fille, un homme qui mange, qui respire et qui vit. Simplement avec quelques années de retard.

source:rue89.com