Epingler les homosexuels étrangers pour leur interdire l’entrée dans les pays du Golfe ?

Nous le savions depuis quelques semaines, les pays du Golfe envisagent de faire passer des examens médicaux aux touristes et migrants afin d’interdire le séjour d’homosexuels sur leurs territoires. La commission chargée des travailleurs immigrés dans le Golfe s’est finalement réunit ce lundi pour en discuter à Mascate au Sultanat d’Oman.

Soumettre ceux qui veulent visiter les pays du Golfe ou y travailler à une visite médicale obligatoire afin de détecter leur homosexualité ?

Il serait donc question de faire passer un examen médical aux ressortissants étrangers avant de les laisser pénétrer dans une pétromonarchie pour éviter de laisser entrer des homosexuels. Personne ne sait quels seraient les indices de détection même s’il est probable qu’il s’agirait de questionnaires.

Amnesty International dénonce cette initiative

Le projet suscite déjà de vives réactions notamment dans la presse koweitienne qui fustige la politique du conseil de coopération du Golfe. Ce conseil s’appuie sur des textes religieux afin de criminaliser les relations homosexuelles. En Arabie saoudite, l’homosexualité est d’ores et déjà passible de la peine de mort.

“Comme si l’on n’avait pas d’autres priorités”, titre l’éditorialiste libéral koweïtien Chamlan Youssef Al-Issa dans le journal Al-Watan. Et de se moquer : “Comme si les pays du Conseil de coopération du Golfe avaient résolu tous leurs problèmes, créé un espace économique commun, réformé leur système d’éducation et dépassé leur dépendance excessive vis-à-vis des revenus du pétrole. Or ces mêmes pays trouvent le loisir de se pencher sur une autre question oh combien essentielle pour leur avenir : l’interdiction d’entrée sur leur territoire de personnes homosexuelles.”

“Est-ce qu’on est conscient des éventuelles répercussions qu’aurait une telle mesure ?” poursuit Youssef Al-Issa. Nombre de responsables des pays occidentaux sont eux-mêmes homosexuels et le journal britannique s’est demandé si les pays du Golfe voulaient qu’on applique la même mesure aux ressortissants du Golfe. D’ailleurs, qu’est-ce qui adviendra du nombre non négligeable de jeunes hommes et femmes du Golfe qui sont eux aussi homosexuels. Va-t-on les chasser ?”

Le journal libéral de référence koweïtien Al-Qabas va dans le même sens : “Il y a des gens homophobes qui s’appuient sur des textes religieux pour condamner et criminaliser les relations homosexuelles. Or c’est une vraie révolution des libertés qui a envahi le monde entier – y compris le monde arabe et musulman et y compris la liberté pour l’individu de disposer de son corps. La question des libertés reste une question difficile et sensible dans le monde arabe et islamique, puisqu’elle touche étroitement la religion. C’est pour cela qu’il est difficile d’avoir un débat à ce sujet.” Et de conclure : “Le 11 novembre, quand les pays du Golfe examineront le projet, le monde entier, et pas seulement Amnesty International, regardera de près ce qui adviendra de ce projet qui est contraire à l’esprit de l’époque et à la révolution des libertés.”

Mais certains journaux défendent l’idée d’interdir les visas aux homosexuels étrangers, comme le journal koweïtien Al-Rai Al-Aam. “Le ministre des Affaires belges Didier Reynders a annoncé que l’Union européenne allait débattre de cette affaire et prendre des mesures appropriées. C’est parfaitement risible”, condamne le quotidien. “Voilà ce que sont les sales droits de l’homme qu’on veut nous imposer.” Et d’énumérer : “La prostitution, l’alcool, et pourquoi pas demain la viande de porc. Bientôt il faudra applaudir des lois autorisant […] le troisième sexe, le quatrième, le cinquième, les hommasses et les efféminés. Pour ceux qui ignorent encore que l’Europe mène une campagne coordonnée destinée à détruire moralement nos sociétés musulmanes sous prétexte de droits de l’homme, qu’ils sachent qu’on a récemment ouvert une mosquée réservée aux homosexuels dans une banlieue parisienne.”

Amnesty International dénonce cette initiative scandaleuse. Le ministre des affaires étrangères belges a fait savoir que l’Union européenne allait évoquer ce sujet lors d’une prochaine cession et que des mesures seraient prises en conséquence.

Avec Philippe Mischkowsky
et Clarence Rodriguez