Don du sang : pourquoi donc exclure les homos ?

L’article de Gabrielle Cluzel consacré au don du sang par les homosexuels pourrait semer la terreur chez des esprits faibles puisqu’elle affirme qu’avec la possibilité qui leur est offerte de donner à nouveau leur sang, « la transfusion sanguine peut devenir une vaste roulette russe ».

Tout d’abord, pour avoir donné sang et plaquettes il y a quelques années, j’ai dû répondre à un long questionnaire, puis « subir » un entretien avec un médecin qui m’a posé toutes sortes de questions sur mes pratiques sexuelles. Il m’a ensuite précisé que, si j’étais accepté comme donneur, mon sang subirait naturellement toutes les sérologies (VIH, hépatites, etc.).

À la question : « Avez-vous eu des rapports homosexuels ? », n’importe quel quidam peut bien évidemment mentir, l’homosexualité n’étant pas inscrite sur le visage des donneurs et aucun test ADN valable concernant l’homosexualité n’étant à ce jour disponible. Ainsi, l’interdiction faite aux homosexuels de donner leur sang n’était qu’une interdiction de façade puisque consistant à une simple « déclaration sur l’honneur »…

Alors, pourquoi exclure des homosexuels fidèles et séronégatifs (si, si, ça existe), alors qu’aucune interdiction ne serait faite aux hétérosexuels multi-partenaires ne prenant aucune précaution lors de leurs rapports sexuels ? Et comment parler de « roulette russe » alors que, les terribles leçons du drame du sang contaminé ayant été retenues, les dons de sang et de composés sanguins sont particulièrement stricts en France ?

Pour mémoire, tout don de sang subit les tests suivants avant d’être jugé comme « réinjectable » :

• Dépistage du virus du SIDA (test anticorps et détection du génome viral).
• Dépistage du virus de l’hépatite B (test antigène HBs et test anticorps anti-HBc).
• Dépistage du virus de l’hépatite C (test anticorps et détection du génome viral).
• Dépistage des virus HTLV-I /II (test anticorps).
• Dépistage de la syphilis.
• Dépistage de l’agent du paludisme.
• Dépistage de l’agent de la maladie de Chagas (les deux derniers ne concernant que les personnes ayant séjourné dans des pays où ces deux parasites sévissent…).

Enfin le « facteur VIII », coupable de la transmission du VIH aux hémophiles dans les années 80, n’est plus chauffé, sa sécurisation étant assurée depuis 26 ans (excusez du peu) par un double traitement par solvant (Tri-n-buthyl phosphate 0.3 %) et détergent (chlorate de sodium 0.2 %) plus efficace que l’ancienne technique. Cette sécurité a été améliorée depuis l’apparition de doutes concernant le lien entre l’ESB (Encéphalopathie spongiforme bovine, dite maladie de la vache folle) et la maladie de Creutzfeldt-Jakob, puisque le facteur VIII livré en France subit, en plus du traitement chimique, un double filtrage anti-prion (agent pathogène de la MCJ) à 35 nm puis 15 nm. Sachant que le VIH mesure de 80 à 120 nm, il n’a donc aucune chance d’arriver à passer ce double filtrage (sauf à affirmer qu’on peut faire entrer un Airbus A380 dans une boite de conserve…).

Comme disait l’humoriste américain Robert Benchley pour définir la psychanalyse : « Dites-moi quelles sont vos phobies et je vous dirai ce qui vous fait peur. »

Philippe David – Cadre dirigeant à l’international. Auteur de : De la rupture aux impostures