Deux ans ferme pour une agression homophobe : « Ils voulaient me buter parce que je suis pédé »

Le 13 novembre dernier, vers une heure du matin, un plombier de 36 ans se rend en voiture à Bobigny, en Seine-Saint-Denis, où un certain « Antony », contacté un peu plus tôt sur une application de rencontres, lui a donné rendez-vous. « Sous prétexte de discrétion », l’appât l’emmène dans un recoin obscur où l’attendent deux autres individus, « capuche rabattue et visage dissimulé derrière une écharpe ». Aussitôt pleuvent les insultes homophobes, puis les coups. Barre de fer, poing américain et même une « brique ». Le trio va ainsi s’acharner sur la victime, jusqu’à ce qu’un groupe de jeunes de la cité voisine, alertés par ses cris, « mettent fin à son calvaire ».

« Sans mon intervention, ils l’auraient tué », a confirmé un témoin aux enquêteurs, qui ont interpellé mardi le prévenu. Âgé de 18 ans, il a été jugé en comparution immédiate, ainsi qu’un jeune de 17 ans, présenté pour sa part vendredi à la justice des mineurs, précise l’AFP. Le troisième n’a pas été retrouvé.

Dans le box, ce 2 novembre, il a soutenu avoir été « terrorisé » par ses complices. Puis, interrogé sur le mobile, affirme qu’ils en avaient « après son argent ».

« J’ai un vieux portable et une Clio pourrie », s’est insurgée la victime. « Ils voulaient me buter parce que je suis pédé » : « J’ai pensé que j’allais mourir ! » Sans parler des séquelles psychologiques, il souffre de de fractures multiples et s’est vu prescrire 60 jours d’interruption totale de travail.

Dans la salle, son compagnon et des amis sont venus le soutenir. Des enquêteurs de Bobigny sont également présents. « Un tel déchaînement de violence n’est pas courant », aurait glissé l’un d’eux.

« L’homosexualité est tellement refoulée dans certains milieux » que ses agresseurs avaient la conviction qu’il n’irait pas porter plainte. « Ils n’ont même pas cherché à cacher les armes », retrouvées, ainsi qu’une cagoule tachée de sang, au domicile du mineur, a observé Marie-Claire Gras, l’avocate de la victime.

« Il a été dépassé par son acte » mais « il y a un début de prise en compte de ce qu’il a fait », a plaidé de son côté Florian François-Jacquemin, l’avocat du prévenu, suggérant que son client, au casier vierge, « pourrait être un gay refoulé », des clichés de sexes masculins ayant été retrouvés sur son téléphone.

« Pourriez-vous être homosexuel ? », lui a d’ailleurs demandé la présidente. « Ce serait problématique pour ma famille car nous sommes musulmans », a-t-il d’abord rétorqué, avant de l’admettre, « ça serait possible », et présenter des excuses à la victime.

Relevant toutefois « l’absence de remords » et la « gravité exceptionnelle » des faits, le parquet a requis trois ans ferme. Le jeune homme a été condamné ce 2 novembre à quatre ans de prison dont deux ferme, assortis d’une obligation de soins.

Anne V. Besnard
stophomophobie.org