Contours de la discrimination en entreprise : critères, différences de traitement admises, risques pour l’employeur…

Qu’il s’agisse d’un entretien d’embauche, d’une promotion ou d’un licenciement, les motifs de décision invoqués par l’entreprise doivent être de l’ordre strictement professionnel. Les considérations sur des éléments extérieurs au travail tels que le sexe, la nationalité, la religion n’ont pas à intervenir dans le choix, sous peine de sanction.

1. Qu’est-ce qui constitue une discrimination?

Selon la loi du 27 mai 2008 modifiée le 18 novembre 2016 par la loi de modernisation de la justice, une discrimination est une distinction de traitement portée au salarié ou à une personne candidate à un emploi, stage ou formation sur un motif autre que les nécessités de l’emploi ou les qualités professionnelles du salarié. Le salarié est traité de manière moins favorable que ne l’a été ou ne l’aurait été un autre dans une situation comparable.

A savoir, que tout salarié témoin ou rapporteur d’agissements discriminants (lanceur d’alerte) ne peut pas non plus être sanctionné, licencié ou faire l’objet de mesures discriminatoires.

Un salarié refusant de mettre en oeuvre une mesure discriminante ne peut faire l’objet d’un blâme.

2. Quels sont précisément les critère de discrimination?

La loi recense aujourd’hui 23 motifs de discrimination: l’origine du salarié, son sexe, sa situation de famille, sa grossesse, son apparence physique, sa situation économique, son patronyme, son lieu de résidence, son état de santé, son handicap, ses moeurs, son orientation sexuelle, son âge, ses opinions politiques, ses activités syndicales, sa langue, son ethnie, sa nationalité, ou sa religion. Ils portent atteinte à sa dignité.

3. Comment peuvent se traduire ces discriminations?

Les pratiques discriminatoires au travail dont un salarié peut être l’objet se traduisent souvent dans les faits par une différence flagrante sur:

• l’accès à l’emploi,

• la rémunération, comprenant le salaire (traitement de base) mais aussi les mesures d’intéressement, et autres avantages en espèces ou en nature par l’employeur au salarié,

• les mesures de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification ou de promotion professionnelle,

• l’empêchement d’un salarié d’adhérer ou de s’engager dans une organisation syndicale ou professionnelle.

4. Quelles sont les différences de traitement admises ?

Certaines différences de traitement liées à l’âge entre salariés ou candidats à l’emploi (stage ou formation) ne sont pas considérées comme discriminantes lorsqu’elles sont objectivement justifiée par un but légitime. Exemple: la fixation d’un âge maximum ou minimum pour préserver la santé ou la sécurité du travailleur, favoriser son insertion professionnelle, assurer son emploi, son reclassement ou son indemnisation en cas de perte d’emploi.

Par ailleurs, certains travaux sont réglementés en raison de leur pénibilité (port de charges, emploi aux étalages extérieurs…).

A noter: les mesures prises en faveur des personnes résidant dans certaines zones géographiques ou vulnérables en raison de leur situation économique ne constituent pas une discrimination si elles visent à favoriser l’égalité de traitement.

5. A qui faire appel en cas de discrimination?

Le salarié qui s’estime victime de discrimination peut se tourner vers plusieurs interlocuteurs.

• Les agents de contrôle de l’inspection du travail peuvent recevoir tout document ou tout élément d’information (quel qu’en soit le support), utile à la constatation de faits susceptibles d’établir l’existence d’actions discriminantes.

• Les organisations syndicales représentatives au plan national ou dans l’entreprise peuvent exercer en justice toute action relative à des agissements discriminatoires, en faveur d’un salarié de l’entreprise ou d’un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation en entreprise.

• Les associations de lutte contre les discriminations régulièrement constituées depuis au moins 5 ans peuvent exercer en justice toute action relative à des discriminations, en faveur d’un salarié de l’entreprise ou d’un candidat à un emploi, à un stage ou une période de formation en entreprise. En cas de discriminations liées au handicap, l’action peut également être intentée, sous les mêmes conditions, par les associations dans le domaine du handicap.

• Les délégués du personnel disposent d’un droit d’alerte en cas d’atteintes aux droits des personnes et aux libertés individuelles résultant de mesures discriminatoires. Ils peuvent saisir l’employeur qui doit procéder sans délai à une enquête et mettre fin à cette situation.

• Le Défenseur des droits est une autorité constitutionnelle indépendante chargée, notamment, de lutter contre les discriminations, directes ou indirectes, prohibées par la loi. Il est aussi chargé d’orienter vers les autorités compétentes toute personne signalant une alerte (“lanceur d’alerte”) dans les conditions fixées par la loi et de veiller aux droits et libertés de cette personne.

Il peut être saisi par toute personne qui s’estime victime d’une discrimination mais peut peut également se saisir d’office ou être saisi par les ayants droit de la personne dont les droits et libertés sont en cause. Il assiste la victime de discrimination dans la constitution de son dossier et l’aide à identifier les procédures adaptées à son cas. Si les faits portés à sa connaissance lui semblent constitutifs d’un crime ou d’un délit, il en informe le procureur de la République. Il peut également présenter ses observations devant les juridictions civiles, pénales ou administratives saisies de faits relatifs à des discriminations.

Si une réclamation est adressée à un député, à un sénateur ou à un représentant français au Parlement européen, il la transmet au Défenseur des droits s’il estime qu’elle appelle son intervention.

La saisine du Défenseur des droits est gratuite et n’interrompt pas les délais de prescription des actions en matière civile, administrative ou pénale.

6. Que risque l’employeur en cas de discrimination?

La personne reconnue coupable de discrimination encourt :

• une sanction disciplinaire, s’il s’agit d’un salarié de l’entreprise,

• des sanctions pénales (trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende).

Les personnes morales peuvent aussi être déclarées responsables pénalement d’actes de discriminations.

Les personnes condamnées pour discrimination depuis moins de 5 ans ne peuvent se porter candidats aux marchés publics.