Cinéma : « Toutes les vies de Kojin » ou le calvaire d’un jeune gay au Kurdistan irakien

Menacé de mort dans son pays, persécuté, violé même par des hommes qui voient en lui une alternative à l’abstinence avant le mariage, mais le tueraient par application de la charia, « Toutes les vies de Kojin » c’est l’histoire d’un jeune homosexuel de 23 ans « qui cherche à exister au sein d’une société où il semble ne pas pouvoir trouver sa place ».

Le réalisateur, Diako Yazdani, réfugié politique en France, l’a rencontré sur Facebook. « Il avait laissé des commentaires sur une page de soutien à la cause LGBT. Je lui ai fait part de mon projet, parler des contradictions d’une société qui revendique la liberté politique des individus mais leur refuse les libertés sexuelles », et Kojin a accepté de témoigner. C’est le seul, compte tenu des risques. L’occasion pour Diako Yazdani de lui présenter sa famille, classe moyenne et très pieuse, et jauger ainsi les réactions, points de vue…

Au fur et à mesure du tournage, Kojin va également s’affirmer, arborant notamment du maquillage dans la rue. « Avec ma caméra, j’étais toujours prêt à fuir. Comme Kojin. Même quand je filmais ma famille mes mains tremblaient. J’avais peur qu’on nous dénonce », confie le réalisateur.

Une scène de confrontation entre le jeune et un groupe d’hommes est particulièrement édifiante. « Ça m’a pris presque trois ans pour la préparer, trouver et convaincre deux religieux, deux traditionnels et deux intellectuels », explique Diako Yazdani. « Je cherchais des personnes qui possédaient une forme de compassion et d’autres qui en manquaient. Je leur ai fait croire que Kojin était un comédien de théâtre qui jouait un homosexuel. Un des hommes avait un pistolet (le port d’arme est autorisé en Irak)… J’avais très peur qu’il s’énerve. »

Kojin finit par rejoindre l’Allemagne. C’était sa seule solution : « Fuir pour sauver sa vie ». Si ce n’est qu’il sera aussi rejeté au sein de l’UE, déshumanisé par sa politique migratoire de la honte.
On lui refuse l’asile, exige des preuves de son homosexualité, le loge avec des homophobes…

Combien de vies lui en faudrait il, à Kojin – qui ne connaît pour majorité de sa courte existence que la haine, la discrimination et la violence – pour enfin trouver la sécurité et la paix ?

« Avec humour et poésie, le réalisateur livre un portrait émouvant où les rencontres des uns et des autres invitent à une réflexion universelle sur la différence. »

Aller voir ce film documentaire, c’est donner de la visibilité à Kojin, c’est récompenser les risques qui ont été pris par Diako Yazdani pour montrer ceux qui sont invisibles, c’est faire face à la réalité de ce monde dans lequel nous vivons.

Prix du jury au Festival Chéries-Chéris, « Toutes les vies de Kojin » sort en salle ce mercredi 12 février 2020.