Sondage : 51% des Italiens favorable à un statut légal pour les couples homosexuels

Dernier grand pays d’Europe occidentale à ne reconnaître aucun statut légal aux couples de même sexe, l’Italie avance pourtant sur la question, pressée par une société civile moins frileuse que la classe politique.
Alors que d’autres bastions catholiques comme l’Espagne, le Portugal, l’Irlande ou encore Malte cédaient l’un après l’autre ces dernières années, les projets de loi instaurant des unions civiles en Italie sont toujours retournés dans les tiroirs.

“En Italie, il n’y a aucun type de loi, ni pour les couples, ni pour les célibataires, aucune loi contre l’homophobie, rien de rien. C’est une honte pour notre pays”, explique à l’AFP Flavio Romani, président d’Arcigay, la principale association homosexuelle du pays, en dénonçant “des politiciens trop attentifs au pouvoir clérical”.
Un nouveau projet de loi se présente cependant sous de meilleurs auspices. Actuellement examiné en commission au Sénat, il devrait être soumis au vote de la chambre basse avant l’été, et adopté avant la fin de l’année, selon des responsables du Parti démocratique (PD) de Matteo Renzi.
Le chef du gouvernement se heurte à l’opposition de ses alliés du centre-droit, qui ont déposé des milliers d’amendements pour contester deux points essentiels : la pension de réversion et surtout la possibilité d’adopter l’enfant du partenaire.
“C’est une loi que nous aurions dû approuver il y a 15 ans. Mais c’est une loi assez bonne”, estime M. Romani, tout en rappelant la revendication des associations comme Arcigay: le mariage.
Pour la faire passer, M. Renzi devrait pouvoir s’appuyer sur plusieurs partis de gauche, dont l’un le SEL, est dirigé par un homosexuel déclaré, sur les contestataires du Mouvement 5 étoiles et même sur de nombreuses voix du parti Forza Italia de Silvio Berlusconi.
Les enquêtes d’opinion, assez rares sur le sujet, sont claires: selon deux sondages Ipsos et Euromedia d’octobre, environ 75% des Italiens sont favorables à un statut légal pour les couples homosexuels, mais seulement un tiers acceptaient le mariage ou l’adoption généralisée.
Selon un autre sondage publié mercredi par La Stampa, et réalisé cette fois après le oui irlandais, les Italiens seraient désormais 51% à approuver le mariage homosexuel.

– Créativité –

Mais les oppositions restent vives. Mardi soir, le secrétaire d’Etat du Vatican, équivalent d’un Premier ministre, a jeté un froid en déclarant que le oui irlandais au mariage gay était non seulement une “défaite des principes chrétiens” mais aussi une “défaite pour l’humanité”.
Mgr Nunzio Galantino, proche du pape François et secrétaire général de la conférence des évêques d’Italie, a dénoncé de son côté “un délire de l’émotivité et un sommeil de la raison” poussant l’Italie sur le même “plan incliné” que le reste de l’Europe.
Malgré tout, l’Eglise reste en retrait du débat sur le projet d’union civile, et les manifestations sont très limitées. “Il semble que pour l’instant, l’Eglise officielle se soit fait une raison”, relève M. Romani.
Ce n’est pas le cas du collectif “Si alla famiglia” (“Oui à la famille”), qui rassemble une quarantaine d’associations chrétiennes et estime que comme en France ou en Irlande, l’union civile ouvrira tôt ou tard la voie au mariage.

“Si l’union civile est créée, les juges y ajouteront l’adoption”, assure à l’AFP le président du collectif, Massimo Introvigne, professeur de sociologie à l’Université pontificale de Turin.
“L’Italie a résisté au divorce 200 ans de plus que la France. Je ne sais pas si on pourra résister jusqu’au bout, mais il faudrait faire preuve de créativité pour ne pas se contenter d’imiter les autres”, insiste-t-il.
En attendant, la créativité est aussi de l’autre côté. Des communes comme Milan, Naples ou récemment Rome ont ouvert des registres locaux d’unions civiles, des couples italiens grignotent des droits devant les tribunaux ou partent à l’étranger le temps de se marier ou de faire des enfants.
Ingrid Lamminpää, Italo-suédoise, a ainsi emmené sa compagne Lorenza Soldani dire “Ja” en Suède, dans l’espoir de lancer une “révolution à coups de bouquets”.

AFP