Selon l’écrivain et essayiste Christian Combaz, l’homosexualité ne saurait être réduite à une communauté

Depuis des lustres, le monde Gay/Lesbien etc refuse d’être enfermé dans une classification rigide de ses dispositions psychologiques et hormonales sous le prétexte qu’il existe des milliers de positions intermédiaires du curseur, et que certains sont «un peu ceci et un peu cela», même s’il existe des dominantes.

Ce discours du «je ne suis pas réductible à ma conduite sexuelle, je n’ai pas de territoire assigné» est aujourd’hui fortement démenti par la popularité croissante, dévorante, omniprésente du drapeau arc-en-ciel qui prétend réunir sous une bannière identique des gens dont on persiste à nous rappeler qu’ils sont différents et qu’ils n’ont pas de patrie.

Ce paradoxe vient de connaître un nouveau développement avec le vote du mariage gay par le Congrès américain, où la bannière étoilée s’est mélangée à l’autre, à grands coups de photoshop. Il a inspiré aux membre du réseau Facebook ayant révélé leur homosexualité, mais aussi aux sympathisants et militants, d’appliquer un filtre arc-en-ciel proposé par la maison-mère sur leur photo comme le font les candidats aux élections qui se croient obligés de faire figurer le drapeau national sur leurs affiches de campagne. A force de zèle dans ce sens, on va finir par nous rappeler qu’un drapeau, c’est un territoire. En brandissant un drapeau à tout bout de champ, on incite les autres à brandir le leur. En tout cas les adversaires du drapeau gay, et de la propagande américaine dont il est l’objet en ce moment ne s’y sont pas trompés à l’Est.

Le fait qu’un blogueur russe ait imaginé une contre-attaque sur Facebook au nom de la Russie en guise de représailles patriotiques contre les homos témoigne que l’utilisation du drapeau gay a été dévoyée jusqu’à faire croire qu’il s’agit désormais d’autre chose que d’une famille de pensée : il s’agit d’un pays moral qui a ses ambassadeurs, son ministère de la propagande et qui est donc susceptible d’offenser ses voisins et de réveiller chez eux la démangeaison de la contradiction. Si la politique s’empare de la question homosexuelle jusqu’à devenir une ligne d’affrontement politique entre les nations, il n’est pas certain que les gays dans le monde aient grand-chose à y gagner. Ils ont même tout à y perdre – le sommeil pour commencer.