Mariage gay En Belgique, la vie normale des couples homos mariés

« Nous nous sommes mariées, nous avons acheté une maison et eu un enfant »: Anne-Sophie et Cathy vivent « comme tout le monde » en Belgique, où les familles homosexuelles ne sont « presque plus regardées de travers ».

« C’était un vrai mariage de princesses, avec 400 invités, la Rolls-Royce louée, les robes longues et la pièce montée », se rappelle Anne-Sophie Baptist. « Nos familles, pourtant plutôt traditionnelles, étaient ravies ».

Trois ans plus tard, en 2010, la famille s’est agrandie avec la naissance d’une fille, qu’Anne-Sophie a adoptée après une année de démarches administratives.

« En bref, nous sommes devenus un couple bêtement normal, à la seule différence que notre fille a deux mamans », résume Anne-Sophie, âgée de 33 ans et employée de la société des chemins de fer belges. Pour les différencier, la fillette en appelle une « maman » et l’autre « mama ».

Joris Gilleir et Olivier Brouckart ont également un souvenir ému de leur mariage sur la Grand Place de Bruxelles, « dans la salle de l’hôtel de ville où se sont mariés des rois et des princes ». « Ce jour-là, nous étions très fiers », témoigne Joris Gilleir, un militaire de 43 ans.

Depuis, les deux hommes « forment une vraie famille » avec Louve, leur petite fille de 3 ans qu’a mise au monde une amie lesbienne et dont ils ont la garde une semaine sur deux.

Comme Joris et Olivier, plus de 8.000 couples homosexuels ont dit « oui » devant le bourgmestre (maire) depuis la légalisation du mariage homosexuel en 2003 en Belgique, deuxième pays à l’accepter après les Pays-Bas.

En 2010, les unions entre femmes (551) ont été pour la première fois supérieures à celles entre hommes (531). Elles sont plus nombreuses en Flandre qu’en Wallonie.

« Sur le mariage, les homosexuels ont désormais les mêmes attitudes que le reste de la population. Certains le jugent essentiel pour vivre ensemble, d’autres non », souligne Annick.

Cette jeune Bruxelloise de 34 ans et sa compagne de 38 ans n’ont « pas encore franchi le pas ». Elles se sentent « suffisamment protégées par le statut de cohabitant légal » qui, comme le Pacs en France, est accessible aux couples homosexuels comme hétérosexuels.

« La légalisation du mariage a été importante car elle a fait de nous des citoyens à part entière, égaux aux autres. Elle a aussi changé le regard de la société, même si toutes les discriminations n’ont pas disparu », souligne Joris Gilleir, qui préside l’association Homoparentalités.

Dans la vie quotidienne, « nous n’avons presque jamais de problèmes. A l’école de notre fille, tout le monde est au courant et nous ne cachons rien », témoigne Anne-Sophie Baptist.

« Je n’ai jamais entendu de réflexion désagréable », se félicite aussi Dominique Adamski, un Français qui s’est installé en Belgique avec son conjoint Francis Deken pour s’y marier. « Si Franck va à la boulangerie et que la vendeuse ne m’a pas vu depuis longtemps, elle lui demande +Et votre mari?+ », raconte-t-il.

Enflammées il y a une décennie, les polémiques se sont progressivement tues et seule une partie de l’Eglise catholique continue à afficher publiquement sa forte réticence. « Parler de mariage reste un abus de langage et un abus démocratique », a déclaré en 2011 l’archevêque de Bruxelles, Mgr André-Joseph Léonard.

Trois ans après le mariage, les homosexuels belges ont gagné en 2006 le droit d’adopter. Mais le bilan est maigre: seuls cinq couples ont réussi à obtenir un enfant à adopter.

« La loi est là mais son application s’avère extrêmement difficile: il est quasiment impossible de trouver un enfant à adopter à l’étranger, et le nombre d’enfants adoptables en Belgique est extrêmement faible », explique Verlaine Berger, de l’association Arc-en-ciel.

De ce fait, les couples homosexuels continuent à se tourner vers la co-parentalité ou la fécondation in-vitro, même si elles n’offrent pas aux deux parents un statut égal vis-à-vis de l’enfant. « Nous avons le droit à l’homoparentalité mais il faudra encore lutter pour en bénéficier pleinement », souligne Joris Gilleir.