En Russie, thérapeutes et religieux proposent prières et hypnose pour « soigner » les homosexuels

Alors qu’en Tchétchénie, le président Ramzan Kadyrov, fidèle de Vladimir Poutine, est accusé d’exactions contre la communauté, la BBC qui a enquêté a recueilli le témoignage d’un psychothérapeute russe, Yan Goland, 80 ans, qui assure avoir « guéri » 78 homosexuels et 8 personnes transgenres, à l’aide d’une méthode développée durant l’Union soviétique, par son professeur, un certain « Nikolai Ivanov ».

Un « traitement de huit à dix-huit mois », plus long pour les trans, avec des séances d’hypnose qui peuvent durer jusqu’à huit heures et combinées à des sessions de psychanalyse et de thérapie d’identité pour « influencer les rêves ». Il s’agit ensuite de forger une attraction pour le sexe opposé, en invitant notamment les hommes à manifester plus d’intérêt pour la gente féminine. La troisième étape implique un passage à l’acte.

« Quand un patient vient me consulter, je lui montre des cas similaires et leurs évolutions notables. Il est alors rempli d’espoir et comprend rapidement la nécessité d’être soigné », explique-t-il.

« Une expérience catastrophique et préjudiciable » confie pourtant Yuri, 40 ans, qui a subi le « traitement » au début des années 1990. « Je pensais me réveiller hétérosexuel. Mais le résultat a mis ma vie et sexualité en lambeaux. »

Et le « psychothérapeute » continue d’exercer, comme d’autres « spécialistes du genre » persuadés que les LGBT « souffrent d’un trouble obsessionnel-compulsif » (TOC), alors que l’homosexualité n’est plus officiellement considérée comme une maladie mentale dans le pays depuis 1999.

Des organisations religieuses proposent aussi des soins. Elles évitent d’entrer dans les détails, mais Yevgeny Peresvetov, pasteur moscovite, est convaincu du bénéfice de sa thérapie « pour aider les homosexuels à rejeter leur sexualité » : une « dépendance » symptomatique d’une « haine spirituelle », affirme-t-il, résultant plus particulièrement pour les gays, de « l’absence de figure paternelle » sinon « violente » : « En découvrant Dieu, le père, il accède à la vérité ! »

Son groupe « Vosstanovleniye », pour « réhabilitation » ou « résurrection », diffuse même des vidéos sur YouTube d’homosexuels qui se seraient ainsi « libérés du péché ».

Maria, 27 ans, en a fait les frais, contrainte par sa famille d’exorciser à 13 ans son homosexualité en absorbant de l’eau bénite, avant d’être battue à la baguette pour annihiler son attirance pour les femmes, induite par Satan, « tandis que des fidèles récitaient des prières » dans l’église.

D’autres dénoncent des attitudes intolérantes chez les médecins, résignés dans leurs préjugés. Mais Pavel Sobolevsky, rare psychologue qui travaille avec des associations LGBT, insiste : « Il existe plusieurs orientations différentes et l’homosexualité est l’une des variantes normales. Ce n’est pas une maladie, vous ne pouvez pas non plus la modifier, et toute tentative serait préjudiciable », a-t-il ajouté à la radio britannique.

Selon un sondage de l’institut Vtsiom, 88% de la population russe approuve l’interdiction de la « propagande pour les relations sexuelles non traditionnelles », passible d’amendes et peines de prison.

Terrence Katchadourian
stophomophobie.com