Les jeunes ont leur Refuge (en France)

Au mois de mai dernier, l’association française « Le Refuge » prenait contact avec Arc-en-Ciel Wallonie pour envisager des échanges entre la France et la Belgique. Cet été, Jean-François Donfut, administrateur d’Arc-en-Ciel Wallonie, est allé les rencontrer sur leur terrain, à Montpellier.

L’association montpelliéraine « Le Refuge » s’est créée en 2003, sous l’impulsion de son président, Nicolas Noguier. Celui-ci a mobilisé les volontés à travers la France autour du constat suivant : les jeunes LGBT ont 6 à 16 fois plus de risque  de tenter de mettre fin à leurs jours que les jeunes hétérosexuel-le-s. Ces appels de  détresse des jeunes se manifestent la plupart du temps dans un contexte d’isolement social, réel ou anticipé, ce compris des situation de rupture avec le milieu familial d’origine. Les pressions psychologiques, voire les violences physiques, amènent ces jeunes dans des situations de détresse et de demandes d’aide, auxquelles les institutions françaises ne peuvent pas toujours faire face, faute de formation au sujet de la réalité vécue par ces jeunes. Pour la seule année 2011, c’est près de 500 jeunes qui sont entrés en contact avec l’association, par internet, par téléphone, ou en passant la porte d’une des délégations régionales (Montpellier, mais aussi Paris, Marseille et Lyon) ; 313 d’entre eux ont été accompagnés et réorientés vers d’autres services ; 80 ont pu trouver une place dans un des hébergements proposés par l’association, et pouvoir ainsi être accompagnés dans une démarche sociale vers l’autonomie.

La nécessité d’intervenir auprès de ces jeunes ne s’arrête pas aux frontières françaises, puisque les demandes adressées au Refuge viennent également des états limitrophes, y compris de Belgique. L’invitation a donc été lancée par Nicolas Noguier pour qu’Arc-en-Ciel Wallonie parte à Montpellier afin de découvrir le travail réalisé au quotidien auprès des jeunes de l’association, et susciter en Belgique un projet similaire. Nous sommes donc partis à Montpellier, mais aussi à la délégation de Paris, pour mieux nous rendre compte des réalités du terrain.

Chacune de ces délégations est composée de son délégué régional et d’une conseillère en économie sociale et familiale. Un chargé de développement prend en charge au niveau national les Volontaires du Service Civique (qui remplace en France le service militaire, et se réalise sur base volontaire). Les « services civiques » sont au nombre de cinq : trois à Montpellier et deux à Paris. Ces équipes sont renforcées par la présence, quelques heures par semaine, d’une psychologue, d’un médecin référent et d’un avocat. L’équipe des bénévoles soutient les salariés dans l’accompagnement des jeunes lors des permanences tenues dans les différents locaux (plusieurs fois par semaine) mais aussi le soir aux appartements. Le travail réalisé auprès des jeunes hébergés est un travail de mise à l’autonomie. En effet, ces jeunes sont en rupture par rapport à leur milieu familial, en lien avec leur homosexualité (ou transsexualité), et n’ont pour la plupart aucun revenu propre. L’accent est donc mis, sur les six mois renouvelables qui leur est accordé au sein de l’association, sur la mise en ordre administrative (notamment si le jeune n’a pas la nationalité française), l’obtention d’un emploi avec l’aide des services « Pôle emplois » (équivalent du Forem), et enfin, l’association les accompagne dans la recherche d’un logement, marquant ainsi la fin de l’hébergement par l’association. Douze places sont disponibles à Montpellier, et treize à Paris.

Les jeunes qui font appel à l’association ont entre dix-huit et vingt-cinq ans, et sont presque tous issus de milieux sociaux défavorisés, avec une histoire familiale difficile, ou viennent de familles où les valeurs religieuses sont très importantes. Plusieurs ont vécu un temps à la rue, certains ayant pratiqué une prostitution de survie, ou sont tombés dans les drogues et l’alcool. Les médias français se font de plus en plus souvent le relais du discours de ces jeunes, et deux ouvrages ont été réalisés sur base du travail de cette association : d’une part, « Casse-toi ! » de Jean-Marie Perrier (reprenant les témoignages et récits de vie des jeunes du Refuge), et d’autre part, « Etre homo aujourd’hui en France » de Michel Dorais et Isabelle Chollet (étude réalisée auprès des jeunes en contact avec l’association).

Partant des réalités de ces jeunes et des témoignages qu’ils nous ont confiés, Arc-en-Ciel Wallonie envisage de rencontrer les différents intervenants du secteur social belge afin d’envisager la création d’une structure, encore à déterminer, qui permettrait de répondre aux signaux d’alerte envoyés par les jeunes LGBT vivant des situations familiales difficiles, entourant l’annonce de leur homosexualité.

 

Jean-François Donfut

 

 

source:http://arcenciel-wallonie.be/web/acw/infos/352-les-jeunes-ont-leur-refuge.html