La Cour suprême américaine autorise l’administration Trump à imposer le sexe de naissance sur les passeports

La Cour suprême des États-Unis a donné son feu vert, jeudi 6 novembre, à l’administration Trump pour appliquer sa nouvelle politique sur les passeports. Celle-ci impose désormais d’indiquer le sexe assigné à la naissance et supprime toute possibilité de mentionner un autre genre, y compris l’option « X » introduite sous la présidence Biden pour les personnes non binaires, intersexes ou non conformes de genre.

Cette décision, rendue par la majorité conservatrice du tribunal, suspend une injonction prononcée au printemps par une juge fédérale du Massachusetts. La magistrate Julia Kobick, nommée par Joe Biden, avait bloqué la mesure en estimant qu’elle risquait de causer des « préjudices irréparables » aux personnes transgenres et non binaires, exposées à un risque accru de harcèlement et de violences lorsqu’elles voyagent avec des documents ne correspondant pas à leur identité de genre.

Depuis 2021, les citoyens américains pouvaient choisir librement le marqueur de genre figurant sur leur passeport, sans justificatif médical, et recourir à la mention « X » pour refléter une identité autre que masculine ou féminine. Ce dispositif s’inscrivait dans une série de mesures d’inclusion adoptées sous Joe Biden, destinées à reconnaître la diversité des identités de genre dans les documents officiels.

Revenu à la Maison-Blanche en janvier, Donald Trump a rapidement annulé cette politique à travers un décret intitulé « Defending Women from Gender Ideology Extremism and Restoring Biological Truth to the Federal Government » (« Défendre les femmes contre l’extrémisme de l’idéologie du genre et restaurer la vérité biologique au sein du gouvernement fédéral »).

Le texte impose à l’administration américaine de n’utiliser que deux catégories, « male » et « female », basées sur le sexe de naissance. Le gouvernement justifie cette décision au nom de la « cohérence scientifique » et du « rétablissement de la réalité biologique ».

Dans sa décision, la Cour suprême a estimé que « mentionner le sexe de naissance sur un passeport ne viole pas le principe d’égalité, pas plus que n’indiquer le pays de naissance : il s’agit simplement d’un fait historique ».

Les trois juges démocrates, Sonia Sotomayor, Elena Kagan et Ketanji Brown Jackson, ont exprimé une dissidence ferme. Cette dernière a dénoncé « la voie ouverte à une souffrance immédiate, sans justification réelle ». Elle estime que la majorité « pave une fois de plus la route à la discrimination, sous couvert de neutralité administrative ».

L’ACLU (American Civil Liberties Union), qui représente plusieurs plaignants, juge que la mesure « met directement en danger » les personnes trans, non binaires et intersexes lorsqu’elles utilisent leur passeport.

Trump a déjà fait rétablir l’interdiction des personnes transgenres dans l’armée, réduit les financements pour la recherche sur les questions LGBT+ et supprimé les programmes fédéraux de diversité et d’inclusion.

Pour de nombreux observateurs, cette tendance marque un recul sans précédent des droits des personnes LGBTQIA+ au niveau fédéral, alors même que plusieurs États américains avaient récemment avancé sur la reconnaissance juridique des identités trans et non binaires.

Au-delà du symbole, la mesure aura des conséquences concrètes. Les voyageurs dont l’apparence ou l’identité ne correspondent pas à la mention figurant sur leur passeport risquent d’être confrontés à des contrôles renforcés, des interrogatoires ou des violences, notamment dans les pays criminalisant les personnes trans.

Pour les plaignants, il ne s’agit pas d’un débat théorique. « Nous voulons simplement pouvoir voyager sans crainte d’être humiliés, détenus ou agressés », ont-ils rappelé dans leur recours.

Le contentieux se poursuivra devant les tribunaux inférieurs, mais la décision de la Cour suprême permet dès à présent à l’administration Trump d’appliquer sa politique. Elle envoie surtout un signal clair : aux États-Unis, les droits des personnes LGBTQIA+ sont redevenus un champ de bataille politique.