Jean-Marie Le Pen condamné en appel pour injure et incitation homophobes

La Cour d’appel de Paris a confirmé ce jeudi 3 octobre 2019 la condamnation de Jean-Marie Le Pen pour des propos homophobes tenus en 2016. L’ancien président du Front national, aujourd’hui âgé de 91 ans, écope ainsi d’une amende réactualisée de 2400 euros, contre 800 en première instance. Il devra également en verser 6000 à l’association Mousse, à titre d’indemnité civile.

Ces fonds permettront notamment de faire un don à l’association Ardhis, qui soutient les réfugiés LGBT, a réagi Mousse. « Ils vont servir à accueillir en France des étrangers LGBTQI persécutés dans leur pays ! »

Pour rappel, le 18 mars 2016, interrogé sur les affaires de pédophilie dans l’Église catholique, Jean-Marie Le Pen avait affirmé dans son « Journal de bord » vidéo : « l’abaissement des règles morales est une constante d’une société décadente, et je crois que la pédophilie, qui a trouvé ses lettres de noblesse… interdites, mais tout de même, dans l’exaltation de l’homosexualité, met en cause toutes les professions qui approchent l’enfance et la jeunesse. »

Le 21 décembre suivant, questionné par le Figaro au sujet de la présence de personnes homosexuelles au sein du Front national, Jean-Marie Le Pen avait encore déclaré : « les homosexuels, c’est comme le sel dans la soupe, si y’en a pas assez c’est un peu fade, si y’en a trop c’est imbuvable. »

Mousse avait alors porté plainte, le 23 décembre, pour incitation à la haine à raison de l’orientation sexuelle.

De même, sa condamnation pour une réflexion faite à la suite de l’hommage rendu au policier Xavier Jugelé, tué par un terroriste sur les Champs-Élysées, en avril 2017, a là aussi aussi été confirmée. Estimant en effet que Xavier Jugelé méritait « certainement l’estime et l’attachement de nos compatriotes comme membre de ces forces de l’ordre chargées de nous protéger », M. Le Pen avait dans le même temps regretté que l’on rende « plutôt hommage, qu’au policier, à l’homosexuel car la participation de son conjoint (Etienne Cardiles) et le long discours qu’il a prononcé institutionnalisaient en quelque sorte le mariage homosexuel, l’exaltaient de façon publique […] Je pense que cette particularité familiale doit être tenue à l’écart de ce genre de cérémonie qui gagnerait elle-même à plus de discrétion. »

Selon Me Etienne Deshoulières, avocat de STOP homophobie et de l’association Mousse, « Jean-Marie Le Pen fait partie d’un temps où l’homophobie pouvait être exprimée par des hommes et des femmes politiques. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Cette décision marque un coup d’arrêt de l’homophobie en politique. ».

Par ailleurs, Mousse souligne qu’une étude menée par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) démontre que les discours homophobes ont une influence directe sur la santé mentale des homosexuels eux-mêmes. Selon cette enquête « les valeurs et manifestations hétérosexistes et homophobes présentes dans la société et ses institutions exposent les minorités sexuelles à une pression qui pourrait expliquer l’apparition de problèmes de santé physique et mentale chez une plus grande proportion de cette population » [1].

Les homosexuels qui adhèrent aux idées politiques de Jean-Marie Le Pen sont les premières victimes de cette homophobie intériorisée. Ils vivent dans ce que les sociologues appellent la « dissonance cognitive », c’est-à-dire la tension entre un système de valeurs auquel ils adhèrent et des pratiques vécues comme contradictoires avec ce système [2].

Selon une enquête de l’Institut de veille sanitaire réalisée auprès d’un échantillon d’homosexuels masculins, un tiers des répondants âgés de moins de 20 ans déclare avoir fait au moins une tentative de suicide [3].

Comme le mentionne l’Observatoire national du suicide dans un rapport de novembre 2014, « par rapport à d’autres types de discriminations, les effets des discriminations homophobes sont aggravés par la faiblesse du soutien de la famille » [4]. Dans le même sens, un rapport de la Commission nationale consultative des droits de l’homme de juin 2014 a mis en évidence la vulnérabilité particulière des jeunes LGBT, en soulignant les importants risques de suicide [5].