Homophobie : la face cachée du sport

« Le livre noir du sport » de l’élu francilien Patrick Karam et la journaliste Magali Lacroze vient de sortir (Ed. Plon) et la partie consacrée à l’homophobie doit nous faire réagir.

Nous savons toutes et tous que rien n’est jamais gagné pour les LGBT, que le niveau d’homophobie dans la société française reste dangereusement élevée, qu’aucune ni aucun d’entre nous n’est à l’abri d’une agression verbale ou même physique. Et nous n’avons pas le droit de l’accepter, surtout quand le signal d’alarme est tiré, comme le fait justement cet ouvrage.

Les constats dressés par « Le livre noir du sport » nous concernent toutes et tous, que l’on pratique ou non une activité sportive. Que l’on soit homo ou hétéro, car comme pour de toutes les discriminations, c’est l’ensemble de la société qui est concernée quand l’égalité en droits et en dignité est gravement bafouée.

Toutes et tous concernés quand des milliers de jeunes LGBT souffrent dans la pratique du sport, du football et des autres sports collectifs dans lesquelles l’homophobie est non seulement banalisée mais qu’elle va même jusqu’à jouer un « rôle éducatif », comme le souligne Patrick Karam, docteur en sciences politiques et vice-président chargé des Sports de la région Ile-de-France, déjà auteur d’un solide Rapport pour le Ministère des Sports sur le sujet en 2013.

Comment un jeune gay peut-il s’épanouir quand il entend à longueur d’années son entraîneur, ses coéquipiers stigmatiser les « pédé », « tapette », « tarlouze » ?

Le livre dénonce ces harcèlements jamais sanctionnés, qui peuvent pourtant conduire au suicide. Il dénonce le silence, les responsables sportifs au plus haut niveau qui nient l’homophobie, l’invisibilisation des LGBT contraints de cacher qui ils sont, de mentir (comme ce joueur de foot de Ligue 1 qui pose pour un magazine avec une femme, sous les yeux de son petit ami…) ou encore de partir, pour ne pas devenir les souffre-douleurs de leurs coéquipiers, de leur staff ou supporters ultra.

On fait le constat effarant que depuis le début des années 2000, et malgré les actions fortes menées par des associations comme le Paris Foot Gay, rien n’a changé car rien n’est engagé par les pouvoirs publics et les responsables des fédérations et ligues sportives pour lutter réellement et efficacement contre l’homophobie. On fait le constat également que les engagements militants permettent, à force d’énergie, quelques victoires symboliques mais décisives, comme de faire reculer le tout puissant président de la Fédération Française de Football, Noël le Graët, qui refusait l’arrêt des matchs en cas d’actes homophobes, mais le demandait pour les actes racistes, pourtant tout aussi graves et condamnables.

Les engagements militants trouvent un relais politique avec ce livre, qui préconise un traitement de choc tant attendu face à l’homophobie, ses ravages, ses morts. Il faut en finir avec le pinkwashing, ces coups de com’ qui ne servent que d’alibi aux instances sportives. Une communication claire sur le fléau de l’homophobie doit être mise en œuvre, mettant en scène des sportifs de haut niveau qui doivent enfin prendre leurs responsabilités, réaffirmer les valeurs solidaires d’un sport pour toutes et tous. Former et sensibiliser les éducateurs, les arbitres, les jeunes sportifs en centre de formations, les clubs de supporters : il est urgent de passer des promesses jamais tenues, du chabada aux actes concrets, programmés, financés, évalués ! Les actions en justice doivent être mises en œuvre, les victimes doivent être accompagnées, les associations de lutte contre la lgbtphobie aidées dans leurs actions devant les tribunaux.

Homophobie, sexisme, racisme…

Constats, actions et réactions : voilà le programme de ce « Livre noir du sport » et de ses préconisations, dont nous attendons maintenant la traduction en actes.