INTERVIEW. GPA à l’étranger : Christiane Taubira, reconnaît la complexité de la situation

Ce mardi 29 juillet, la ministre de la Justice était l’invitée de la matinale de France Inter. S’exprimant notamment sur la gestation pour autrui, Madame Taubura a réaffirmé son interdiction sur le territoire français mais avoue, concernant les enfants nés de mères porteuses à l’étranger “ne pas pouvoir s’accommoder de l’idée” qu’ils soient “anonymes ou apatrides.”

“Les enfants ont droit à leur identité et lorsqu’ils existent ils faut les transcrire à l’état civil”.

>> Christiane Taubira… plusieurs personnalités dont d’anciens ministres et premier ministre ont signé une pétition demandant à François Hollande de renforcer les lois contre la gestation pour autrui, et cela, après la décision de la Cour Européenne des Droits de l’Homme qui oblige la France à transcrire â l’état civil les actes de naissance d’enfants nés de mères porteuses à l’étranger. Qu’allez-vous faire ?

Il n’y a pas lieu de faire quoi que ce soit. Nous avons un Code civil qui interdit de façon absolue la gestation pour autrui. Donc, dans l’ordre juridique français, la gestation pour autrui n’est pas autorisée.

>> Et si elle est faite à l’étranger, de parents biologiques français ?

Elle est de toute façon faite à l’étranger, et les parents concernés sont des parents français.

>> Et on les inscrit à l’état civil ?

Ce que la cour européenne des droits de l’homme impose à la France, c’est effectivement la transcription dans le registre d’état civil. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il y a deux sujets. D’une part, il y a la question de la nationalité des enfants. Une fois que la filiation est établie, le Code civil lui même indique que par filiation, on acquiert la nationalité. Donc si la filiation biologique est établie entre les parents et l’enfant, l’enfant a la nationalité. Donc, il a droit à ses papiers établissant sa nationalité. Mais lorsqu’il y a une suspicion de gestation pour autrui, il y a une saisine du parquet, donc du procureur, qui prononce et autorise ou non la transcription à l’état civil.

>> Mais la cour européennes dit qu’il faut transcrire.

Les deux arrêts de la cour européenne sont intéressants. Elle distingue la situation des parents de la situation des enfants. C’est à dire que la Cour européenne réaffirme que la France a parfaitement le droit de considérer que la GPA fait l’objet d’un interdit absolu au nom de l’indisponibilité du corps humain. Mais que cependant, les enfants ont droit à leur identité, que par conséquent, lorsqu’ils existent il faut les transcrire.

>> C’est une façon de reconnaître la GPA à l’étranger. Ceux qui auront les moyens pourront le faire, et leurs enfants seront reconnus en France.

C’est la complexité de la situation. Par exemple, le droit actuel dit que l’on peut poursuivre les personnes qui facilitent le recours à la GPA, si ces faits sont constitués sur le territoire français. Ou si dans le fait où c’est fait, c’est interdit par la loi. Donc de toute façon, on est en train d’aménager les choses… Le droit aménage déjà les choses, parce que tous les pays n’ont pas la même législation, que des choses qui sont parfaitement autorisées dans un pays ne le sont pas dans un autre, et que par conséquent, les pays où ça n’est pas autorisé, se retrouvent devant le dilemme très difficile : ou bien ces pays là autorisent, ou bien ils continuent d’interdire… mais ils ne peuvent pas se contenter de regarder des textes de lois, des niveaux de sanctions, des conditions de sanctions, ils doivent aussi tenir compte de la situation des enfants. Personnellement, je ne peux pas m’accommoder de l’idée d’enfants qui seraient anonymes ou apatrides. Par conséquent, je crois que nous devons faire attention effectivement à traiter la situation des enfants, tout en réaffirmant fortement que la GPA est interdite.

>> Mais, on ne change rien, on ne change pas la loi ?

Il n’y a pas en terme de droit la nécessité de changer quelque chose. Si c’était le cas, nous en aurions tiré les conséquences.

Dans l’interview, c’est à partir de 9mn 30

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